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Nous vivons actuellement un période sanitaire très difficile par laquelle la pensée de la mort nous touche plus ou moins au quotidien, selon nos sensibilités et en actualité des évènements de notre environnement.
Quelque soit notre position face à l'histoire, celle des sociétés occidentales, jusqu'aux confins asiatiques, est toujours un héritage de l'implantation chrétienne en collaboration avec les pouvoirs laïcs, bien sûr en tenant compte d'autres influences qui marquèrent les bordures méditerranéennes de l'Europe. Les symboles religieux comme ceux de la croix furent d'abord des attributs impériaux avant de devenir ceux du clergé régulieér . Nous allons voir les enjeux qui marquèrent notre construction culturelle occidentale autour de l'artéfact de la Croix : comment peuvent-ils se manifester en arrière plan des signes visibles, de l'histoire en place et comment la lire. [Pour les détails qui aménent la croix telle que nous la connaissons comme symbole chrétien voir : Piotr Skubiszewski, La croix dans le premier art chrétien. Paris, 2002.]
Le premier grand acte politique de Charlemagne fut d'adopter la Bible de Saint Jérôme, dite La Vulgate, pour parvenir à l'orthoxie chrétienne mise à mal par les apocryphes. Bible qui fut interdite pendant la crise de la Réforme du XVI° siècle et rétablie en tant que Bible des Catholiques par le Concile de Trente qui marque la fin du Moyen Âge.
Les iconographies des martyres des saints seront pourtant essentiellement issues d'un apocryphe rédigé par l'évêque de Gènes, Jacques de Voragine, au XIII° siècle : La Légende Dorée. C'est elle que nous allons questionner pour l'iconographie de Saint-Amant-de-Montmoreau.
La découverte que je fais en ce moment d'une iconographie atypique entre dans cette famille des réponses qui peuvent être données sur les questions fondamentales souvent ou parfois posées par les historiens d'art traitant de la préexistence des artéfacts aux écritures quand l'écriture est absente ou qu'on la découvre différée voire très postérieure aux productions dans le réel. L'art, l'artéfact devient écriture. Alors quel mode de lecture ?
Dans l'église de Saint-Amant de Montmoreau (Charente), sur laquelle je travaille grâce à la double autorisation de Monsieur le curé de la paroisse et de Monsieur le Maire de la commune, cette question prend soudain une place très particulière. Tellement particulière que j'en rédige un avant article en partant, pour la méthode, de cet exemple de l'iconologie d'un couvercle de sarcophage mérovingien, contrôlée et corrigée par un éminent professeur spécialiste de ces questions sur les périodes médiévales.
Etant d'un naturel très méfiant sur les questions des symboles et repérant aisément les interprétations projectives par une longue pratique professionnelle de l'Art Thérapie en institution, je veux aborder ici une autre face de la lecture des formes et des artéfacts sans sources écrites directement liées à l'objet d'étude ciblé.
Je vais commencer par l'expérience de Poitiers pour amener le lecteur dans les méandres de la lecture de la corniche de Saint-Amant;
Voici l'expérience que je propose
D'abord le couvercle de Sarcophage et ensuite la corniche de Saint-Amant-de-Montmoreau
Le mien fut ce couvercle de sarcophage sans que le professeur ne me dise jamais quel était cet objet !!!
Ci-dessous la corniche de Saint-Amant de Montmoreau
sur laquelle il n'existe aucune étude ni même mention d'inventaire
Il s'agit donc d'ne invention totale au sein de l'invention
de l'église qui l'abrite.
Première étape
je vous propose le devoir que j'ai rendu avec la note du professeur, Monsieur Piotr Skubiszewski
Plan de l'étude ( La division en quatre chapitres est une contrainte de la méthode iconologique fixée par le professeur)
1. Le contexte mérovingien
a) cadre historique,
b) cadre spirituel.
2. Poitiers Coeur spirituel
a) Saint-Hilaire,
b) Sainte Radegonde
c) Saint Fortunat
d) Première constatation sur une probable incidence iconographique.
3. Iconographie du sarcophage
a) famille et forme
a1 : identification
a2: sources littéraires
b) Le décor poitevin
b1 : identification
b2 : sources littéraires
c) La croix sommitale
c1 : identification
c2 : sources littéraires
4. Iconologie
a) synthèse iconographique
a1 : couvercle et "croix à trois traverses"
a2: cet ensemble décrit, plus la croix sommitale
b) une iconologie, langage vernaculaire pour un dogme
b1: sources iconographiques
b2: une réponse à a théologie de la mort du corps
b3: un probable écho iconographique de l'anastasie
Conclusion
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Bibliographie
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Bible utilisée : une traduction de Louis Second docteur en Théologie
Couvercle N°13 de sarcophage provenant
d'Antigny (Vienne) et déposé au baptistère Saint-Jean
de Poitiers
1 : le contexte mérovingien
a) Le cadre historique
La période mérovingienne s'étend historiquement sur trois siècles (Encyclopédie Quillet, 1977, p.4191) : du milieu du cinquième siècle au milieu du huitième siècle. Si la date de 458 marque le début de cette civilisation avec le roi Mérovée, elle est aussi celle traditionnellement attribuée au martyre de Saint-Cyprien à Antigny (Gaiffer, 1955, p.328).
Ainsi se trouvent campés, dès l'origine, les deux aspects fondamentaux qui ressortent de l'analyse politique mérovingienne.
Pendant trois siècles la société mérovingienne va chercher un ciment social (Delaruelle, 1953, p.65), et la rencontre de Clovis avec Saint Martin de Tours illustre cette indispensable union du monde Franc avec le monde Romain (Level, 1953, p.188). Tours c'est aussi le même territoire commun à ces deux mondes, conquis par la barbarie, comme le reste de la Gaule. Ainsi la conquête militaire a besoin, pour s'installer comme une valeur politique à part entière, de l'étai spirituel, d'où, peut-être, cette exceptionnelle importance que vont prendre les évêques (Garaud, 1953, p.137), une suprématie du pouvoir religieux.
b) Le cadre spirituel
Si on en croit Gaudemet (Gaudemet, 1984, p.335), on ne trouve pas plus de trente citations de la Bible dans un concile Gaulois à cette époque.
Par ailleurs, l'organisation civilisatrice, pour ne pas dire politique, paraît appartenir à l'organisation religieuse, soit à une certaine organisation spirituelle. R.Latouche (R.Latouche 1970, p.269 à 271) évoque le contraste flagrant qui résulte de l'implantation des monastères par rapport à la barbarie qui règne de façon générale sur la province. Symboliquement, le lieu religieux devient une sorte de Jérusalem Céleste (Salin, 1953, p.269 à 271) et le village devient ce lieu des passions barbares aux mœurs sauvages.
La Gaule Mérovingienne peut donc avoir cet aspect de pays sauvage parsemé de lieux "phares"; presque cette vision colonisatrice de comptoirs. De ces lieux sacrés partent les chemins de l'évangélisation, ou y aboutissent.
Déjà, face à une iconographie probable, on se trouve devant une société aux tout premiers balbutiements d'une civilisation qui s'extirpe d'autres traditions, d'autres coutumes. Comment les formes nouvelles , imposées par le Christianisme, vont-elles pouvoir supplanter une très lourde tradition géométrique ? Ne résultera t-il pas une certaine ambiguïté entre décor géométrique et géométrie de la croix, de ce transfert iconographique d'une civilisation conquise par une civilisation qui n'a pas encore tout à fait imposé ses lois, ou qui ne les a pas encore véritablement trouvées ?
2 : Poitiers Coeur spirituel
a) Saint Hilaire
Saint Hilaire, évêque de Poitiers (315 ? - 367 ?) fut le maître spirituel de Saint Martin de Tours (Encyclopédie Quillet, 1977, op.cit., p. 3128).
Mais la présence de Saint Hilaire à Poitiers c'est aussi celle du saint qui avait dirigé la marche victorieuse des Francs Chrétiens contre les Goths Ariens. C'est la première victoire de la chrétienté sur la barbarie, cette parole qui avait dominé toutes les autres (Adrien-Meunier, 1977, p.271).
A partir de Sain Hilaire, Poitiers fonctionne à l'image d'un coeur qui attire et renvoie les axes des chemins de la chrétienté colonisatrice , de Rome en Irlande en Grane-Bretagne (Dubois, 1953).
b) Sainte Radegonde
Radegonde (521-587), reine de France qui se retire à Poitiers comme simple nonne dans le monastère Sainte-Croix qu'elle a fondé, peut représenter, par son exemple, une première forme possible de réaction contre la barbarie des mœurs de son temps.
Attirée à Poitiers par la réputation du tombeau de Saint Hilaire (Aigrain, 1987), elle fut de son vivant presqu'une sainte, considérée comme telle, et de toute façon canonisée après sa mort (Encyclopédie Quillet, 1977, op.cit., p. 3647).
Le fait parait admis comme une vérité historique, Radegonde fit venir à Poitiers des reliques de la vraie croix. Des reliquaires n'est connu que celui daté du XI° siècle . Notons cependant que la croix est à deux traverses.
Radegonde est également attachée à la préparation de l'évangélisation de la Grande-Bretagne (Dubois, op.cit., 1953, p.75). , et, compte tenu du sentiment que tout Chrétien doit s'assimiler à la croix (Delaruelle, 1953, op.cit, p.75) il n'est pas étonnant de trouver dans l'expédition d'Augustin, préparée par Grégoire, la croix comme thème central de l'entreprise spirituelle et la croix comme triple symbole de la Passion, de la Gloire et de la Justice.
En fait, les auteurs font allusivement remarquer que l'exaltation de la vraie croix par Radegonde n'est que l'aboutissement logique d'une dévotion qui n'avait cessée de croître à partir de Saint Hilaire, de la découverte de la vraie croix dans les années 400, et avec les premiers martyrs de l'ère mérovingienne comme Saint Cyprien.
Ainsi cette fidélité au thème de la croix pourrait suppléer à l'anarchie liturgique jusqu'à Grégoire le Grand vers 590 (Vogel, 1962, p. 23 à 43). Une série de miracles relatant des guérisons par la croix renforce cette idée de la croix comme thème religieux central (Adrien-Meunier, 1953, op.cit., p. 76).
c) Saint Fortunat
Venantius Fortunatus (536 ? - 609 ?) est l'auteur d'un oeuvre écrit, principale source de connaissance du contexte intellectuel Mérovingien (Encyclopédie Quillet, 1977, op.cit., p.367).
Fortunat apparaît comme un auxiliaire indispensable à l'aura formé autour de la vocation de Radegonde. C'est, attiré par la réputation de la sainte, que Fortunat se rend à Poitiers et c'est sur invitation de l'illustre nonne qu'il reste dans cette ville.
Si Fortunat fut le biographe d'une sainte et de deux saints - Radegonde, Martin et Germain - il eut certainement un rôle médiatique primordiale entre les peuples barbares et les monastères, par ses compositions d'hymnes parmi lesquels le très souvent cité Vexilla Regis. C'est en quelque sort le créateur de toute une littérature apocryphe enseignée par le chant primitif (Riché, 1984, p.142) avec la croix comme thème central. L'importance que la société mérovingienne accordé à l'évêque n'a pu que renforcer la diffusion des textes de celui qui remplit cette charge à Poitiers (Garaud, 1953 op.cit., p.137-146).
Grand voyageur, Fortunat le fut également, allant de Ravenne à Tours, à Poitiers en passant par Paris (Garaud, 9153, op.cit.). Ne fut-il ainsi une sorte de trait d'union iconographique de Poitiers à Paris ?
d) Premières constatations sur une probable incidence iconographique.
La société mérovingienne, et à plus forte raison celle périphérique de Poitiers, paraît s'organiser autour du pouvoir religieux. La croix peut également apparaître comme "l'étendard" de ce pouvoir, comme le chapitre essentiel d'une Bible seulement connue à travers les poèmes apocryphes et les textes hagiographiques.
Ce phénomène , par une sorte d'étude chronologique de la société mérovingienne à travers les saints, existe dès l'origine de cette civilisation et sans attendre cette réflexion de Grégoire le Grand rapportée par Riché (Riché, op.cit., p301): "L'mage est utile dans l'église afin que ceux qui ignorent les lettres puissent, du moins, en contemplant les murs, apprendre ce qu'ils ne peuvent lire dans les livres".
La croix reste le message biblique fondamental de cette société.
Sans anticiper on peut presque affirmer qu'il faut déjà évacuer une ambiguïté probable entre tradition géométrique barbare et image de la croix, dans ce cas précis d'une iconographie cultuelle.
3. Iconographie du sarcophage
a : Famille et forme
a1: Identification
Le sarcophage N°13 déposé au baptistère Saint-Jean fut entreposé là par le père La Croix (Papinot, 1986, p.39). Il appartient à un type particulier appelé type poitevin (Durliat, 1985, p.39) et provient d'Antigny, lieu du martyre de Saint-Cyprien en 458 (Bénédictins, 1952, p.251, T.X).
Durliat en fait un type particulier par le constant report de la sculpture sur le couvercle exclusivement. Toujours selon Durliat, ce type de sarcophage prendrait la suite chronologique de la fabrication des coffres funéraires des V° et VI° siècles.
Il ne s'agit plus d'un coffre funéraire, mais d'un véritable sarcophage de forme trapézoïdale. L'expication de la forme trapézoïdale du sarcophage obtenue par une taille tête-bêche ne tient absolument pas au regard des sarcophages doubles qui ont cette même géométrie et qui sont pourtant taillés dans le même sens (Papinot, 1986, p.40).
La dimension du couvercle renvoie à une sépulture d'adulte.
a2 : Sources littéraires.
Le choix de la sépulture a lui-même son origine dans les évangiles selon Saint-Luc (Luc, 23.53.).
S'il y a évolution vers la forme trapézoïdale , est-il permis de penser à une probable incidence d'un certain anthropomorphisme Chrétien ? Une dimension humaine de la sépulture ? Deux sarcophages ont été nécessaires pour réaliser un seul coffre capable de recueillir le cercueil de Radegonde (Aigrin, op.cit. p. 145). Le sarcophage était donc une sorte d'enveloppe funéraire aux dimensions du corps humain.
Cependant, il ne nous est pas permis de passer sur cette description des funérailles de Radegonde, par Aigrain, sans nous étonner de l'utilisation d'un cercueil de bois. Pourquoi également couper deux sarcophages pour n'en faire qu'un seul ? N'est-on pas capable d'un tailler un aux bonnes dimensions ? A cette époque ne taille t-on que des sarcophages et pas de coffre funéraire, tout simplement ? Si c'était le cas , cela couperait court à toute une piste iconographique probable, les sarcophages ne s'inscrivant plus dans une filiation des coffres funéraires, de là quel sens donner à de probables réemplois (Eygun 1962) ?
b) Le décor poitevin
b1: Identification
Ce couvercle de sarcophage, en pierre, est orné de bandes plates disposées de façon transversale sur un axe central, moins large, qui relie deux bandes centrales à une de pied et à une autre beaucoup plus large, espèce table, en chef. Ce décor apparaît en faible relief. Sur la table sommitale apparaît, taillé en creux, un jeu de triangles inscrits dans un cercle, le sommet tourné vers le centre. Ce motif sera étudié dans un autre chapitre.
La description qui vient d'être faite, fut appelée, dès le XIX° siècle "croix à trois traverses" par le Révérend Père de La Croix (La Croix, 1887, p.6). Le jeu de ces formes pouvant être lu différemment selon les individus, et pour cela laissons parler Ginot (Ginot, 1954, p.46) : "Grand couvercle en deux morceaux (couvercle cassé). Croix à quatre traverses. A la tête, croix octogonale".
Le nombre des traverses variant suivant les auteurs, lequel a raison ?
Pour Richard (Richard 1912, op.cit.), bien que remarquant l'absence totale de décors pour un tiers des sarcophages, il n'hésite pas à attribuer un sens trinitaire aux deux tiers restants, qu'ils voit tous pourvus de croix à trois traverses. Raisonnablement, le nombre pouvant varier, sur la population des sarcophages, de trois à sept traverses, et même neuf, il ne me serait pas possible d'accorder plus de crédit à la thèse trinitaire de Richard.
Pour Siauve il s'agit d'une reproduction des cercles de fer des anciens cercles funéraires, et Périn (Périn, 1980, p.11) semble appuyer cette hypothèse par une mise en parallèle des deux motifs. Cette comparaison a quelque chose de troublant, d'autant plus qu'elle n'induit pas un nombre canonique de cercles de fer. Cette version peut s'inscrire dans les vues de Durliat. Peut-elle en être la source ?
Cependant, il semble qu'une comparaison ne peut avoir une valeur crédible que si tous les sarcophages avaient une iconographie fixe, ce qui est loin d'être le cas même s'il y a des similitudes apparentes. Peut-on, également, revenir au cas du sarcophage de Radegonde déjà évoqué ?
Pour Ginot, outre sa lecture précédemment citée, il s'agirait de bandes d'étoffes posées sur les corps des défunts, ces étoffes s'appellent bandelettes. Si on retient le mot "bandelettes", les sources bibliques existent (Luc.24.12., Jean.19.40., Jean.11.44, Jean.20.5-7.), mais alors cela limite la figuration au nombre de deux puisque "bandelettes" renvoie à une coutume de lier les pieds et les mains (Léon-Dufour, 1978, p.138). De plus l'axe central ne s'impose absolument pas. S'il s'agit d'une autre coutume , je n'ai rien trouvé qui justifierait je ne sais qu'elle habitude funéraire.
Pour Eygun, il s'agirait de la figuration schématisée des acrotères des tombeaux romains. Cette comparaison a sa valeur puisque l'aristocratie gallo-romaine es toujours restée présente en tant que seigneurs terriens. Y at-il pour autant continuité entre tombeaux romains et sarcophages mérovingiens ?
Pour Papinot (Papinot, 1986, p.42) le N°13 à quatre traverses représente essentiellement un décor qui se confond avec la structure du sarcophage. Evidemment...
Pour moi...
Sans doute, il convient d'êre, en conséquence, aussi prudent que Papinot, car autant d'individus, autant d'interprétations. Ceci renvoie à une subjectivité non négligeable. Pour ma part j'ai couru d'Antigny à Civeaux, de l'hypogée des Dunes au Baptistère Saint-Jean, j'y suis même revenu plusieurs fois et j'avoue que j'ai du mal à me faire une idée claire et nette de la question. En revanche, je crois, comme quelque chose qui s'est imprégné en moi, après lectures, après analyses, après presqu'une méditation sur les sarcophages et surtout sur le N°8 que cette iconographie ne peut ne pas être en rapport avec la foi Chrétienne et peut-être une pré-iconographie de la Croix. Mais voyons du côté des textes...
b2 : Sources littéraires
Ce motif appartenant, en principe, à tous les sarcophages mérovingiens poitevins à décors (à 2/3 à peu près), on peut croire que le motif est contemporain de la forme et pourquoi pas préexiste, soit virtuellement, soit mentalement, d'où se dégagerait une idée de motif importé. En revanche, le type de sépulture est purement chrétien donc adapté au contexte spirituel. Pourquoi la sépulture chrétienne porterait-elle un décor asiatique ou pour le moins exclusivement barbare (Durliat, 1985, op.cit.).
Il n'est pas absurde de s'imaginer , par rapport à ce qui a été dit, que si le processus mental mérovingien s'extirpe de l'esprit barbare, que son iconographie aille dans le sens d'une tentative de représentation chrétienne.
Si l'exaltation de la croix par Radegonde est effectivement un aboutissement du culte essentiel de la société mérovingienne, si chacun doit devenir sa propre croix, est-il impossible de trouver un texte en relation avec l'ensevelissement et la croix ? La mort est un évènement trop fort pour qu'une littérature apocryphe ne se dégage pas autour du thème, même une forme de code liturgique (Skubiszewski, 1982);
Un poème, bien que lié au monde anglo-saxon peut sans doute, avec une certaine vraisemblance (Dubois, op.cit. 1953), être un témoignage de la pensée animiste primitive et, en ce sens, être un reflet du personnage de la croix dans une sorte de catéchèse mérovingienne. Ce poème est intitulé Le rêve de la croix : "...soudain la croix prend la parole. Elle évoque le temps où l'arbre fut arraché à la forêt pour devenir le gibet des coupables; elle dépeint la tragique cérémonie de la crucifixion; elle dit le courage du héros qui se laisse clouer sur le bois douloureux, et sa propre détresse, car elle est possédée d'une vie spirituelle qui la fait compatissante. Elle témoigne du deuil de la nature pendant l'agonie du sauveur, elle décrit la mort rédemptrice , l'ensevellissement et la mise au tombeau...".
De quoi la sépulture est-elle témoins, si elle est privée de ce qui donne un regard sur le drame qui se joue ? C'est-à-dire sir elle est privée de la croix, ce personnage compatissant, de cette croix à l'image humaine, au témoins de l'humanité du corps au regard de la foi chrétienne ?
C. La croix sommitale
c1 : identification
Une forme ronde divisée en deux fois quatre triangles , les pointes dirigées vers le centre. Ces triangles, bien qu'assez irréguliers, arrivent à se grouper par quatre de façon alternée : grands éclats, petits éclats. Ainsi une croix, aux quartiers garnis d'éclats, paraît surgir. Ce motif renvoie encore à une certaine subjectivité d'interprétation, mais témoigne de la difficulté avec laquelle les sculpteurs maîtrisaient les registres inhabituels. Ce qui était bien dans le sens d'une iconographie en marche.
Cependant par référence aux croix mérovingiennes dites croix de Malte (La Croix op.cit.1909, p.3), et à plus forte raison à celles entourées dun cercle, on se situe dans un registre parisien des plus banals dont les variations sont bien connues (Périn, 1980, p.312-337).
Le problème reste entier pour ce qui est de du remplissage des quartiers , mais l'idée dune croix lumineuse me semble des plus plausibles u regard des garnitures observées dans le catalogue du musée Carnavalet. Pour ce qui est de la forme ronde l'abstraction d'un cercle paraît évidente. Cette croix se situe, de plus, au sommet du sarcophage sur la bande appelée table.
c2 : sources littéraires
D'entrée j'en appelle à Danielou (Daniélou, 1963, p. 143) :
- "Le signe de la croix, dans la tradition judéo-chrétienne primitive, et plus précisément le signe de la croix sur le front, appartient aux rites baptismaux. C'est l'usage le plus archaïque".
L'interdit de faire du mal à ceux marqués d'un signe de Dieu à leur front (Ap.7.3.) peut-il de la même façon être une allusion au baptême ? au signe baptismal ? (Benson, 1983, p. 101).
Par "Société Primitive" Daniélou fait-il référence à la société mérovingienne ? La réponse se trouve dans Etudes Mérovingiennes : "Il s'agit d'une consécration du baptisé au Christ".
Daniélou parle bien de la consécration mérovingienne, mais, personnellement, je force l'iconographie puisque personne ne me dit , et rien ne me prouve que l'homme mérovingien, en situant cette croix au sommet du sarcophage pouvait penser Front du Défunt.
La taille de ce motif s'inscrit dans un cercle. Cette forme ronde représente l'universalité , le côté cosmopolite et total du signe comme un tout un et indivisible (Col.3.11.). Le cercle traditionnel entourant la croix, bien qu'absent, est trop évident pour que je m'interdise de m'en référer à Benson (Benson, 1983, p. 101) : "The circle containing the arms of the cross is emblematic of éternel life. It is a symbol that has been constantly and frequently used through the ages".
Ce qui doit retenir l'attention dans la situation de Benson c'est cette idée de cercle , symbole d'éternité, et ce simple aspect confirme l'interprétation de Daniélou et du coup peut préparer à une iconologie baptismale. Ainsi dans le dictionnaire de Xavier Léon-Dufour (X.Léon-Dufour, op.cit. 1975, p. 139) on peut lire : "Il plonge le catéchumène dans la mort du Christ et devient exigence de vie nouvelle, à la manière du Ressuscité (Rm6, 3-5; Co1,2, 12; 1P 3, 11-21). C'est une nouvelle naissance (Jn 3,5), un sceau (2 Col 1,22; Ep 1, 13, 4,30), une illumination (Lp3,P - 14; He 6,4)...être dans le Christ, c'est une création nouvelle (2 Co 3,17).".
Léon-Dufour vient de faire référence à L'illumination et cette croix aux quartiers remplis d'éclairs que peut-elle être d'autre que la croix irradiante (Jn 8, 12) qui nous ramène inévitablement au devenir du défunt (Marc 16.16.) dans l'incertitude des élus et des damnés (Ep 3.13.).
4. Iconologie
a : Synthèse iconographique
a.1 Couvercle et "croix à trois traverses".
Si j'accepte l'idée d'une forme anthropomorphe du sarcophage, et par conséquent de son couvercle, je me trouve face à une image corporelle, à une image symbolique de l'homme face à son corps. Sur ce corps s'inscrirait une iconographie enveloppant pied et tête et représentant un caractère continu par l'axe central, et intermittent par le jeu des traverses. L'axe vertical souligne, en quelque sorte, toute une verticalité de l'homme, comme une prière qui s'élèverait de la terre au ciel, ou comme un code, traduction vernaculaire de sacramentaire (Vogel, 1962, p.50) ou d'autre apocryphe, peut-être, aussi, un simple schéma mental ou corporel.
Quelque soit le chemin, je constate qu'il s'agit de piste ayant un rapport avec le vécu terrestre, presqu'une spiritualité antérieure à la mort (Riché, 1953, p272). Peut-être une certaine téreure face à la mort ? Inévitablement je m'oriente vers la première moitié de la citation 1 Co.15.4 : "De même nous avons porté l'image du terrestre...".
a.2 : Cet ensemble décrit, plus la croix sommitale.
Le symbole de la croix sommitale renvoie aussi à l'idée de protection par le signe. Pour avoir besoin de protection il faut se propulser dans un avenir. Il peut, en conséquence, apparaître que cette croix de lumière représente la croix de la vie par delà la mort (Jn.8.12.).
Ainsi cette croix divine, représentant la vie spirituelle, associée dans le décor à un ensemble qui rappelle les valeurs du corps , conjugue une sorte d'attitude globale face à la mort, un comportement conditionné (Ep.4.4. et Ep.4.5.) dans cette union finale "Il y a un seul corps et un seul esprit", par l'acte du baptême.
b. Une iconologie : langage vernaculaire pour un dogme.
b.1 : Sources iconographiques.
En acceptant la croix sommitale comme crois frontale, on accepte que la tombe soit une représentation du corps. Le front de la tombe et le front du corps sont pourtant des éléments bien différents, sauf s'il y a substitution symbolique de l'un à l'autre. Ceci renvoie aussi à une acceptation de la conscience de l'homme mérovingien. Cette conscience primitive est donc capable non seulement de symboliser l'objet palpable mais elle est également capable de symboliser l'absence d'objet. La symbolique de l'absence d'objet renvoie également à la symbolique de la présence, pas forcément vue ou palpable. Or, l'homme primitif totalement terrorisé par la mort (Salin, 1953, p.272) peut-il, par la symbolique, en supporter la vue ? En ce sens l'image du sarcophage ne peut-il pas symboliser l'état charnel de l'homme, mais seulement un autre état. Il faut donc nuancer ce qui a été trop hâtivement écrit : sarcophage image du corps.
b.2 : Une réponse de la théologie à la mort du corps.
Dans l'importance donnée aux apocryphes, un rédigé au VI° siècle (Bozoky, 1984, p. 129) raconte les évènements avant la mort et après la résurrection. Ce texte est appelé Evangile de Nicodème ou Actes de Pilate. Ce même texte est situé au V° siècle par un autre auteur, (Skubiszewski, 1982, op.cit., p. 314).
Ces deux auteurs parlent de l'anastasie, soit de la descente aux limbes.
La descente aux limbes, et non pas le simple séjour temporel de l'âme du Christ dans le royaume de la mort, est édifié en dogme ; descente aux limbes comme résurrection du Christ et des Justes.
Le second auteur (Skubiszewski, 1982, op.cit., p. 317) parle de l'arrivée du Christ aux enfers et de la joie des Justes qui succédait à l'enlèvement de la croix du tombeau symbolique : ce dernier acte signifiant la résurrection. Etant entendu que la resurrection précédait la délivrance des Justes. Cette idée de séjour aux limbes, toujours selon M.Skubiszewski, entre crucifixion et résurrection se trouve au V° siècle chez Sédulius, et d'ajouter une référence à Saint-Fortunat qui fait de la Résurrection le jour de la victoire du Christ sur l'Enfer.
b.3: Un probable écho iconographique de l'anastasie.
En quelque sorte l'homme mérovingien qui ne peut pas regarder l'image du mort pour ce qu'elle est, sublime cette image et fonctionne omme un homme perpétuant un principe de plaisir, soit, par-dela la mort retrouver la vie heureuse. En ce sens l'iconographie du sarcophage remplace symboliquement une image de l'homme par un substitut en accord avec un devenir divin, presque par une image de Dieu (Kofman, 1975).
Face à cette espèce de censure morale qu'est l'absolue impossible identification de l'homme à Dieu, même s'il y a identification au père, la seule issue possible c'est que l'homme soit pris en compte par Dieu et pour cela il doit être pleinement identifié pour être Elu. Il doit, outre sa démarche de dévotion - démarche parallèle au Christ d'une certaine façon - porter la marque du Divin (Marc. 16.16) dans l'accomplissement final du dogme. Cette marque ne peut se trouver que sur ce qui symbolise son propre corps, un et déjà indivisible, comme dans une conscience individuelle terrestre et collectiviste terrestre par la fatalité du devenir (ici "collectivisme" renvoie à l'idée d'unité des hommes dans le Christ).
Le pas est franchi, les obstacles sont levés :
"De même nous avons porté l'image terrestre, de même nous porterons l'image céleste" (Col.15.49.).
conclusion
Les nécropoles mérovingiennes s'organisent autour du tombeau du Christ. Les fonds baptismaux aussi étaient présents. Il est même question d'efficacité de la sainteté du saint dans la qualité de la résurrection, suivant la proximité de la sépulture au tombeau.
Le couvercle de sarcophage N°13 me paraît témoigner en ce sens d'une évolution dans la conception du concept de "nécropole". Cette sépulture N°13 ne semble pas avoir besoin de la magique présence du tombeau du saint pour s'élever dans la certitude d'une resurrection : elle possède, de façon autonome, par son iconographie, toutes les litanies capables de réunir le corps et l'esprit dans un même ensemble , un et unifié. Un certain miracle de la croix.
L'iconographie extrêmement synthétique de ce couvercle de sarcophage peut renvoyer à une certaine maturité de la théologie mérovingienne qui, par la puissance de sa symbolique, par son extrême sobriété, a sans doute été la meilleure arme contre la vague iconoclaste, propre à l'époque. Et si j'écris époque, c'est que je ne crois pas, ici, dans la confusion de la valeur de la croix et d'un signe apotropaïque.
Pour conclure définitivement, j'emprunte cette phrase à Xavier Léon-Dufour, au mot "résurrection" de son Dictionnaire du Nouveau testament :
" Elle ne dit pas un simple retour à la vie terrestre (comme Lazare), mais l'accession à la vie pleine et définitive."
Observations de Monsieur le professeur Piötr Skubiszewski
Ce qui est exact : l'anthropomorphisme de la forme du sarcophage.
La croix du baptême juste avant la mort.
Pour la croix à trois traverses : Monsieur le Professeur retient l'hypothèse d'Eygun que j'ai présentée au paragraphe 1 - 1-a2.
Tout récemment, dans le cadre de ma recherche sur le site de Saint-Amant-de-Montmoreau, en visitant un cimetière du XIX° siècle où des sépultures empruntent aux tombeaux romains, j'ai eu la surprise de pouvoir constater la réelle valeur de cette hypothèse. Mais plus qu'une photo de sépulture moderne je préfère vous présenter cette icône ci dessous encore plus parlante et plus en lien historique avec le couvercle d'Antigny
Erreur à ne pas commettre ou à éviter : ne pas faire intervenir des formes de pensées contemporaines dans l'études des iconographies anciennes. Au sujet de mon appel à la réflexion psychanalytique de Sarah Kaufman : La psychanalyse est une forme de pensée du XX° siècle qui n'a aucune parenté avec les formes de pensées médiévales, et dans le cas présent, mérovingiennes.
(ceci forcément soustrait aux cadres d'études toutes les théories pansexualistes de Freud et de ses suivants. Je tiens à cette observation car lorsque j'ai étudie le thème de la Véronique à la demande d'un médecin chef de service de psychiatrie (le Dr Gérard Oppenheim que je salue respectueusement) j'ai bien pris le soin de marquer chaque époque empruntant le thème en fonction des iconographies contemporaines - dans la ligne de l'Eglise ou totalement marginales, pour être le plus exhaustif possible sur la richesse de ce thème qui devait être repris par des psychologues c'est-à-dire par des universitaires de Sciences Humaines, à visées des tautologies des savoirs, sinon des avis, aux analyses et points de vues ne fonctionnant en fait que par une littérature du XX° siècle et les acceptations politiques des valeurs - qui avaient été développées autour du mécanisme de la formation réelle ou prétendue réelle des images achiropoètes, c'est-à-dire sans intervention de la main de l'homme, de la littérature aux production iconographiques. C'est déjà là une introduction à la prochaine iconologie).
Bibliographie
Classement alphabétique tous thèmes confondus
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Périn 1980
Périn 1985
Quillet 1977
Redet 1881
Richard 1912
Riche 1953
Roosens 1965
Saint-Sébastien 1967
Salin 1949
Salin 1953
Skubiszewski 1982
Vogel 1962
Wright 1983
Zodiaques
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| Voir aussi : Jacques Roger avec les collaborationsde Richard Delhourme et Jean-Pierre Floc'h, Les sarcophages du département de la Creuse -Une contribution à l'étude des pratiques funéraires au haut Moyen Âge.Etudes Creusoises N° XXIII- Guéret Société des Sciences Naturelles, Archéologiques et Historiques de la Creuse, 2015 |
Nous passons maintenant à l'iconologie de la corniche
trouvée dans l'église de Saint-Amant-de-Montmoreau
Les chantiers de construction s'imbriquant les uns aux autres, ainsi que les programmes ornementaux, je m'attacherai principalement à une conception d'étude en recherches de "reformulations" des choix architecturaux et ornementaux qui entrent en composition de cette église qui m'apparaît de plus en plus intéressante pour comprendre certaines dynamiques locales qui impliquent tout d'abord un chevet plat d'origine romane dont le modèle purement roman de la petite église de Bors-de-Montmoreau, toute proche, est une des sources pour partir localement d'une veine de constructions des églises à chevet plat du XII° au XIII° siècles. Plus l'étude avance et plus ce premier ancrage s'inscit dans un ensemble plus complexe car, en fait, après investigations plus poussées on remarque une population d'églises romanes à chevets plats n'ayant que peu ou pas du tout de parenté en terme de famille styllistique . Ainsi en recherche d'autres repères locaux nous sommes amenés au chevet plat de l'église Saint-Etienne à Magnac-Lavalette pour laquelle les notices d'auteurs sont plus loquaces et donnent quelques repères historiques comme une donation en 1120 à l'archidiacre d'Angoulème et "refaite" dans la seconde moitié du XII° siècle, écrit Jean George dans Les églises de France - Charente, p. 148. Sur la même page cet auteur nous présente un autre type d'église de la fin du XII° siècle avec un chevet plat, mais le plan est en croix grecque assez irrégulière toutefois : l'église Saint-Cybard de Magnac-sur-Touvre.
Voici pour quelques exemples qui sont comme de premiers contacts avec la profonde originalité architecturale romane de cette région, très progressivement et incidieusement nuancée par l'arrivée du gothique d'Ouest et du Nord. Sans doute en découvrirons nous d'autres en explorant d'une part le terrain qui sera notre première source documentaire - les documents d'archives de la période médiévale semblent très rares et plus bavards au fur et à mesure qu'on remonte vers le XX° siècle- et d'autre part les bibliographies dont la volumineuse étude de Sylvie Ternet . Ainsi les conclusions qui pourront être faites sur cette première approche d'une corniche de l'église de Saint-Amant-de-Montmoreau pourront-elles ouvrir sur d'autres découvertes possibles.
En effet à l'issue de l'étude de cette corniche, ces certitudes, ces axiomes de départ vont être pour le moins ébranlés sans pour autant être fermement invalidés.
Si à Saint-Amant les travaux d'étude de l'architecture ne sont pas terminés et pas encore assez avancés tant il faut entrer dans les finesses des partis architecturaux qui se succèdent et s'imbriquent de fond en comble, l'approche iconologique de la corniche ciblée est non seulement possible mais elle va refondre l'approche du site avant toute investigation archéologique du bâti de l'église proprement dit.
L'église de Saint-Amant fut récemment restaurée sous l'autorité de Monsieur l'Architecte en Chef de Monuments Historiques.
Nous avons les détails de ces restaurations. Elles ne touchent pas le site de cette corniche. En revanche une restauration de la seconde moitié du XIX° siècle modifie au moins les fenêtres de l'avant cœur, site de cette corniche sur l'une de ses piles, pile nord-est, et détruit considérablement une fresque possible entre XIII° et XIV° siècles, dont il subsiste cependant au moins quelques traces que j'ai pu relever en mode archéologique du bâti et aussi photographier.
Seconde étape
La corniche de Saint-Amant-de-Montmoreau
Plan d'étude
En ne nous éloignant pas trop du bassin de la Tude, à l'Est, en Charente aux lisières de la Dordogne il faut encore signaler la nécropole d'Aubetterre en son église monolithe.
1 Le site
a.1 : situation géographique
b.1 : contextes historiques de la région.
b.1.a : période romaine
b.1.b : royaume des Wisigoths
b.1.c : périodes mérovingienne et carolingienne
divisions diocésaines
b.1.d : périodes pré-romanes et romanes.
b.1.c : périodes gothiques
2 La corniche dans l'église Saint-Amant-de-Montmoreaux, circonstances de découverte.
a.2 : Saint Amant
b.2. Une approche du site et du site dans l'église, rapport de la corniche à l'architecture.
c.2 : iconographie, approche d'identification. Une improbable imposte en réemploi
3 Iconologie: sources littéraires.
a.3 : "La doctrine des symbolistes du Moyen-Âge" citations d'auteur.
b.3 : les sources bibliques.
c.3 : rapport aux apocryphes.
c.3.1 : Le mandylion du roi Abgar - Edesse.
c.3.2 : La Bible de Roger d'Argenteuil.
c.3.3 : la Véronique de la Légende Dorée de Jacques de Voragine.
c.3.4 : la Véronique d'Ecouis
c.3.5 : la Véronique des Mystères - Véronique apôtre du Médoc.
Conclusion
Bibliographie
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1. Le site
a.1 Situation géographique
Bassin Aquitain, zone sud-est du département de la Charente, au nord de la Garonne et au sud du fleuve Charente. Saint-Amant-de-Montmoreau est un site en belvédère au nord de la rive droite du vallon du Toulzot, affluent sur la rive gauche du cours supérieur de La Tude affluent de la Dronne elle même affluent de la Dordogne. La vallée de la Tude est une plaine alluviale.
D'assez profonds vallons se succèdent sur les rives de la Tude depuis la Dronne, au sud, jusque bien au-delà de la source de la Tude au nord. Le vallon du Toulzot est l'un d'eux, C'est un site classé d'où, en panorama, on découvre le confluent du Toulzot et de la Tude à Montmoreau.
De nos jours jours la commune de Saint-Amant est intégrée à la communauté des communes de Montmoreau qui regroupe également celles de Aignes-et-Puypéroux, Saint-Eutrope, Saint-Laurent-de-Belzagot. Chacune de ces communes a son église enregistrée dans la famille des églises romanes.
b.1. Contextes historiques de la région.
b.1.a. Période romaine.
D'une façon générale la région charentaise a été relativement peu investie pendant la période romaine. Cette région sud-est l'a été encore moins "...sur les sols tertiaires, on connaît peu ou pas d'habitat, même si la forêt actuelle ne facilite pas les recherches". [ C.Vernou "VII. L'habitat la mise en valeur du sol". Dans, Carte Archéologique de la Gaule - Pré-inventaire archéologique publié sous la responsabilité de Michel Provost - La Charente 16 - Christian Vernou avec la collaboration de Claudine Vernou-Magister et de José Gomez de Soto. Académie des Inscriptions et Belles Lettres, Ministère dela Culture et de la Francophonie - Diffusion Fondation Maison des Sciences de l'Homme, p. 28, 154 et 155]. La carte publiée cible trois villas en bordure de la Tude, échelonnées entre les régions du confluent avec la Dronne, de Chalais et de Montmoreau. Deux villas à l'est sur les bords de la Dronne sur les sites de Bonnes et d'Aubeterre, une à l'ouest assez éloignée du cour inférieur de la Tude, entre Tude et Dronne. Pour Saint-Amant on lit " Au lieu dit Les Sauvages...bracelet en bronze...Près Les Sauvages, sur le revers oriental de la vallée de La Tude, des fragments de tégulae...près de Saint-Amant, le doyen Welsh avait signalé de très nombreuses scories ferrugineuses d'époque antique....".
b.1.b. Royaume des Wisigoths
"De la division des Goths (vers le milieu du III° siècle après J.C.)à l'arrivée des Huns en Ukraine (375), il est impossible d'isoler un art wisigothique spécifique tant la civilisation des Wisigoths est intimement liée à celle de leurs parents ostrogothiques...Après 375...la majorité des Wisigoths quittent leur patrie pour pénétrer dans l'Empire, où ils erreront jusqu'au début du V° siècle [...] Les Wisigoths qui n'étaient pas parvenus à passer du sud de l'Italie en Afrique, décidèrent alors de pénétrer en Gaule...La phase gauloise (412-507)...pour la première fois depuis leur départ d'Ukraine , se stabilisèrent dans le sud-ouest de la Gaule où un "foedus" leur fut octroyé par Rome. C'est ainsi que se forma le "royaume de Toulouse" [...]Il faut donc admettre ...que durant leur séjour aquitain et septimanien qui a duré près d'un siècle, les Wisigoths ne se sont distingués des populations indigènes gallo-romaines, ni par des coutumes funèraires propres, ni par une culture matérielle spécifique."[Patrick Périn, "Wisigothiques (ART)", dans Encyclopédie Universalis - Corpus 23. Paris, 1992, p. 865, 866 (sur pages 865 à 870)./ Adeline Rucquoi, Histoire médiévale de la péninsule ibérique. Paris 1993].
Le christianisme arrive en Espagne au temps des apôtres. Constantin (dates du règne : 306-337) instaure le christianisme dans l'Empire et Barcelone devient évêché régentant la Catalogne alors qu'à Tolède en 400 se tient le 3° Concile. Une poésie lyrique chrétienne voit le jour avec Prudentius Clémens (348- vers 405/10) alors que les premiers écrivains chrétiens (336-387) en s'inspirant des deux testaments sont à l'origine d'un engouement pour la connaissance de la Bible. De 466 à 485 le royaume d'Euric s'étend de Bordeaux jusqu'à Marseille. [William Culigan, "L'Espagne sous les Wisigoths et les Maures". Dans, Histoire des civilisations - Le temps des invasions. Sous la direction de Marcel Brion de l'cadémie Française - Londres 1965, Pari 1968, p. 189 à 196]. Alors que Rome reconduisait son protectorat sur les Wisigoths les Francs venus du Nord poursuivaient leur conquête de la Gaule et la rencontre entre les armées d'Alaric II roi des Wisigoths, allié aux Arvernes, et celle de Clovis, roi des Francs, qui, en 507 à Vouillé, mit fin à la domination des Wisigoths sur l'Aquitaine. Vainqueur de Syagrius en 486, dernier chef Romain, Clovis entreprend l'agrandissement du royaume Franc et repousse une tentative d'invasion des Alamans à Tolbiac en 496, période à laquelle il se convertit au christianisme.
La Gaule unifiée a désormais son premier roi Franc : Clovis dont le décès en 511 divise le royaume entre ses fils, selon le rite coutumier.
b.1.c. Périodes mérovingiennes et carolingiennes
Pour le contexte général sur la période mérovingienne reprendre la présentation de la première étude du couvercle de sarcophage mérovingien.
. On signale une petite nécropole dans le périmètre d'Angoulème à Soyaux mais seules quelques sarcophages sans couvercles (disparus ?) ont été mis en à jour sans que soit signalée la recherche d'un sanctuaire à proximité. La grande nécropole du département de la Charente est celle d'Herpès [Peter Lasko, "Prélude à l'Empire - Le royaume franc, des Mérovingiens à Pépin le Bref". Dans, Histoire des civilisations - Le temps des invasions. Publication de la traduction française sous la direction de Marcel Brion de l'Académie Française - Ouvrage dirigé par David Talbot Rice, traduction française de Henry Daussy. Edition anglaise Londres 1965, édition française Paris 1968 revue et corrigée en 1969, p. 197 à 218]. C'est une nécropole de tombes en rangées creusées en pleine terre (reihengräber). Herpès sur la commune de Courbillac est la plus connue, découvert en 1886 et fouilles par Philippe Delamain qui en donne un compte rendu dans les archives de la Société Archéologiue et Historique de Charente. Deux autres nécropoles sont connues à Ranvitte et à Saint-Amant-de-Graves.
"Les Mérovingiens (486-751), premiers rois de France, vont régner en Gaule après la fin de l'empire roman d'Occident. Mais, loin d'être brutal , le passage est l'aboutissement d'une longue période de transition, l'époque romaine tardive. Du III° au V° siècle, que de mutations sont intervenues !", ainsi Françoise Vallet commence son exposé sur la civilisation mérovingienne [Françoise Vallet, De Clovis à Dagobert - Les Mérovingiens. Paris, 1995]. Pendant les périodes mérovingienne et carolingienne, l'Aquitaine a une histoire mouvementée [voir pour les détails Jean-Marie Augustin, Histoire de la Nouvelle Aquitaine. La Crèche 2017, p. 46 à 54], et d'une certaine façon affirme une originalité territoriale au sein des convoitises.
Jacques Le Goff expose ces aspects contrariés des V° au IX° siècles avec la peste noire qui ravagea l'Empire pendant cinquante ans, à partir de 543, préparant le tragique VII° siècle : " Sans doute les barbares adoptent autant qu'ils le peuvent ce que l'Empire romain a légué de supérieur, surtout dans le domaine de la culture...et dans celui de l'organisation politique.
Mais ici comme là ils ont précipité, aggravé, exagéré la décadence amorcée par le Bas-Empire. D'un déclin ils ont fait une régression. Ils ont amalgamé une triple barbarie : la leur, celle du monde romain décrépit et celle de vieilles forces primitives antérieures au vernis romain et libérées par la dissolution de ce vernis sous le coup des invasions...Ils ont détruit vies humaines, monuments, équipements économiques. Chute démographique, perte de trésors d'art, ruines des routes, des ateliers, des entrepots, des systèmes d'irrigations, des cultures. Destruction continuée, car les monuments antiques en ruine servent de carrières où l'on prend les pierres, les colonnes, les ornements . Incapable de créer, de produire, le monde barbare "réemploie"." [Jacques Le Goff, La civilisation de l'occident médiéval- Les grandes civilisations. Paris 1984, p. 49]. Le même auteur poursuit [p. 150 et suivantes] "Des hommes par leur savoir, ont aussi été du V° au VIII° siècles des phares qui éclaireront longtemps la nuit médiévale. K.Rand les a appelés "les fondateurs du Moyen-âge". Leur rôle à tous a été de sauver l'essentiel de la culture antique, de la ramasser sous une forme assimilable par les esprits médiévaux et de lui donner l'habillage chrétien nécessaire".
Si Jacques Le Goff met en évidence le rôle de Boèce (vers 480-524), d'Isidore de Séville (vers 560-636), de Cassiodore (vers 480-573° et de Bède (vers 673-735), Pierre Riché a démontré que la Renaissance carolingienne était l'abboutissement d'une série de " petites renaissances" survenues après 680 dans les centres religieux à une époque où se constitue à Saint-Gal le modèle architectural monastique qui sera celui de l'occident pré-roman, roman et jusqu'à la fin du Moyen-âge [P.Riché, Les carolingiens. Paris, 1983]. Ces centres religieux Corbie, Fulda, Saint-Martin de Tours, Rome, Pavie, York, Bobbio et bien sûr Saint-Gal, anticipent l'arrivée de l'évènement fondateur de Renaissance Carolingienne, de l'Europe, le couronnement de Charlemagne en l'an 800 [ Arthur Kleinclausz, Charlemagne. Paris, 1977, 1984.]. Dans sa préface Jean Décarreaux écrit " Vu d'occident, le couronnement ne changeait rien dans les faits. Le royaume avait en l'an 800 à peu près l'étendue qui sera la sienne quatorze ans plus tard à la mort de l'empereur...Avant et après le couronnement, il intervint à trois reprises. Dans la querelles des saintes images, qui, de la Constantinople iconoclaste se répercutait à Rome iconophile..." [Jean Décarreaux, Moines et monastères à l'époque de Charlemagne. Paris, 1980.]. La période de Charlemagne est celle d'un retour à la Bible de Saint-Jérôme pour la création des images pieuses. Est-ce à dire que les apocryphes et que les sources antiques ont disparues ou au contraire servent elles une nouvelle fois de modèles pour le redémarrage d'une iconostase ? Les plus beaux chapiteaux romans présents dans le secteurs géographique de Saint-Amant-de-Montmoreau sont magnifiquement sculptés sur des sources de chapiteaux à entrelacs et de chapiteaux corinthiens. La synthèse entre période mérovingienne et culture romaine est semble t-il évidente et vivace en sud Charente jusque dans le XII° siècle.
Les lieux du culte chrétien s'installent sur les site païens : "Les évêques, pour la même raison, eurent l'idée d'établir des églises à des endroits où les païens avaient coutume de se réunir dans le but de vénérer un lieu sacré [....] De toute manière, l'édifice du culte chrétien apparaît comme le lieu privilégié de l'oeuvre d'évangélisation, tant pour "domestiquer" les Barbaresques ou éclairer les païens [...] Les membres de l'aristocratie laïque ou ecclésiastique bâtissent aussi des oratoires à usage funéraire, pourvus comme les églises d'un autel et de reliques [...] La construction et l'entretien de toute ces églises soutiennent l'activité des différents métiers du bâtiment, principalement des maçons et des tailleurs de pierre . Les murs sont peints et tendus d'étoffes. Une place est également faite à la sculpture, surtout dans les pays du midi, soit dans la décoration du monument lui-même - chapiteaux, bases de colonnes, frises - soit dans la confection d'un abondant mobilier dont la nature évolue avec la liturgie". [ Marcel Durliat, Des barbares à l'an mil"". Paris, 1985, p.44 et 45].
La publication en 1996 Les premiers monuments chrétiens de la France - 2 - Sud-Ouest et Centre. ne donne que de rares éléments sur la zone géographique de Basse-Charente qui est celle qui nous intéresse. En revanche, à travers l'historique rédigé par Jean-Claude Papinot (p. 261 à 271) nous avons plus d'informations sur l'implantation chrétienne à partir d'Angoulème : "Les origines de l'Eglise d'Angoulème sont encore plus ténébreuses. Le fondateur aurait été saint Ausonne, disciple de Saint Martial mais le culte n'apparaît qu'au X° siècle. Le premier évêque bien attesté fut Dynamius, au début du V° siècle...l'évêque Lupicin se trouvait aux conciles d'Orléans de 511 et de 533 [...]La présence aux côtés d'Hilaire, de Martin, véritable missionnaire, donna à cette première église poitevine un rayonnement exceptionnel...Vers 360 il se retira non loin de la ville de Ligugé, en ermite, puis rejoint par des disciples, fonda ce que l'on considère comme le premier monastère des Gaules...En Charente l'érémitisme se développa également et des communautés cénobitiques se mirent progressivement en place. Citons parmi les fondateurs Eparchius (Saint-Cybard) à la fin du VI° siècle à Angoulême , saint Amant, saint Fraisne, saint Groux [...] A Angoulème on constate le développement, aux cours de l'époque mérovingienne, d'un ensemble cultuel très important tant à l'intérieur de la ville que dans les suburba. Intra muros, le groupe épiscopal s'est implanté autour de la cathédrale primitive Saint-Pierre qui, détruite lors de la prise de la ville par Clovis en 508, fut reconstruite sur son ordre. Elle fut sans doute consacrée vers 573-576. Après furent édifiés le baptistère Saint-Jean, l'évéché et quelques églises et oratoires". Cet historique de J.C.Papinot nous permet de replacer la dédicace Saint-Amant (église Saint-Amant- de-Montmoreau) dans une source mérovingienne et nous éloigne de l'apocryphe de Jacques de Voragine rédigé au XIII° siècle, tout en comprenant que les apocryphes (légendes et poèmes chrétiens) ont des origines, des sources réelles, dans l'histoire ancienne fondatrice des communautés chrétiennes à défaut d'appartenir aux rédactions des évangiles.
La très récente publication d'une étude sur l'architecture carolingienne, enrichit ce panorama charentais en signalant, près d'Angoulème à Saint-Cybard, des petites chapelles datées de la fin du VI° s. ou du début du VII° s., reprenant une étude de Boissavit-Camus publiée en 1991, ainsi qu'un palais carolingien de "séjour ordinaire du roi" (sic) à Angeac, à 20 kilomètres à l'Ouest d'Angoulème (qui est déjà un site paléonthologique découvert en 2008) [François Heber-Suffrin et Christian Sapin, L'architecture carolingienne en France et en Europe. Paris, 2021, p. 31 et p. 81 et suivantes]
b.1.d. périodes pré-romanes et romanes.
Les architectures religieuses des XI° et XII° siècles signent généralement par leur seule désignation la naissance et l'épanouissement de l'art roman en occident jusqu'au roman des ordres militaires et mendiants dont le roman cistercien. Mais c'est aussi la période de la naissance et de l'arrivée à maturité de l'art gothique qui est d'abord un art qui essaimera dans toute l'Europe pendant trois siècles et plus depuis son berceau en Île de France, et qui lui donnera ses plus vertigineuses cathédrales. Un autre art gothique dit Angevin ou Plantagenêt naîtra dans la seconde moitié du XII° siècle dans les régions d'Ouest de la France mais il sera supplanté par le gothique d'Île de France. Cependant cet art est une des clés pour une approche scientifique de Saint-Amant-de-Montmoreau. Ainsi, certains médiévistes, mettant de côté ce gothique d'Ouest, ont pour habitude de diviser la période en deux grands nœuds historiques : les premières expériences de voûtements en voûtes en berceau et voûtes d'arrêtes autour de Cardona (1040) au nord de la péninsule ibérique et le réaménagement du chœur de Saint-Denis en 1120 par l'abbé Suger [Erwin Panofsky ] à l'origine d'une recherche de la lumière et de la conquête des hauteurs qui donnera très vite avant et autour de 1150, puis dans la seconde moitié du XII° siècle, les grandes cathédrales gothiques de Paris, Chartres, Bourges, Auxerre, Reims, Beauvais... avec cependant chacune un parti architectural propre ... alors que les bâtisseurs romans continuent à imposer des formules architecturales qu'on retrouvera jusque dans le XIV° siècle et parfois plus, semant une certaine confusion dans les classements par des styles attachés à des siècles.
La naissance de l'art roman est un sujet de débats autour de Puig i Cadafalch et de son Premier Art Méridional. Eric C.Fernié revient sur ces influences par un article dont je vous donne ici le résumé d'avant rédaction " L'église Saint-Vincent de Cardona, en Catalogne, du début du XI° s., est généralement considérée, dans le contexte de l'architecture du "Premier Art Roman" du nord de l'Italie, en référence notamment à l'église San Paragorio de Noli. Ceci est sans doute globalement correct, eu égard à la possibilité de comparaisons très proche des deux monuments. Mais c'est sans compter sur le rôle peut-être essentiel d'un des genres d'église les plus importants de Constantinople.
Cet article établit une comparaison entre le Bodrum Camii de Constantinople, le San-Futtruoso de Portofino en Ligurie, et Saint-Vincent de Cardona, respectivement du début du X°, de la fin du X° et du XII° s., pour montrer une suite possible d'influences. Il essai aussi d'établir comment l'édifice catalan a extrait de ces influences un des aspects principaux du nouveau style roman de l'Occident" [Eric C.Férié, "Saint-Vincent de Cardona et la dimension méditerranéenne du premier art roman". Dans, Cahiers de civilisation médiévale - année 2000 - Regards croisés sur l'an mil/43-171/. Université de Poitiers, Centre d'Etudes Supérieures de Civilisation Médiévale. p. 243à 256".].
Marcel Durliat élargit le débat "...Ce premier art roman serait apparu dans la région méditerranéenne, notamment en Italie et en Catalogne, au X° siècle et au début du siècle suivant, et il aurait progressé vers le nord de l'Europe à travers les cols des Alpes , les deux Bourgognes et les vallées du Rhin et de la Meuse.
Cette théorie ne fit pas l'unanimité...Un style en architecture...est d'abord et surtout, une manière particulière de traiter l'espace, c'est-à-dire de combiner les volumes intérieurs et les masses extérieures en vue de certaines fins, à la fois pratiques et symboliques. A ce sujet les descriptions de Puig i Cadafalch sont manifestement insuffisantes, et cette lacune autorisa les archéologues allemands à rejeter son hypothèse de la pénétration du premier art roman jusque dans la vallée du Rhin [...] les pays germaniques développaient une architecture originale, qualifiée d'ottonienne, dont il restait d'ailleurs à définir avec exactitude les rapports avec le style roman [...] Il résulte des découvertes de ces cinquante dernières années qu'il n'y eut pas un premier art roman commun à la majeure partie de l'Europe occidentale, mais plutôt des recherches et des approches différentes dont profita l'art roman pleinement constitué tel qu'il apparut dans le dernier tiers du XI° siècle. Les conclusions auxquelles était parvenu J.Puig i Cadafalch ne sont valables que pour le sud de l'Europe" [ Marcel Durliat, L'art roman. Paris, 1982, p. 53 et 54.]
En refermant par l'ouest de la France la boucle commencée à Cardona, continuée par l'Est et les pays germaniques, nous arrivons sur le Poitou qui nous rapproche de l'Angoumois frontalier des bordures ouest du Périgord site de l'église de Saint-Amant de Montmoreau. Ce qui vaut pour le Poitou ne vaudrait-il pas dans les grandes lignes pour la Charente frontalière ? Le diocèse d'Angoulème est rattaché au duché d'Aquitaine à la fin du X° siècle et passe sous la suzeraineté du comte de Poitiers. Les remarques de Marie-Thérèse Camus sur les relais architecturaux entre fin du premier millénaire et début du second sont celles d'une prudente et longue expérience de l'art roman et principalement dans les pays d'Ouest ; "Ainsi le bilan architectural établi à partir de la documentation écrite et de l'examen archéologique est à la fois étonnant et décevant. Etonnant il l'est, par le grand nombre d'églises existant en Poitou vers l'an mil et qui nous incite à beaucoup de prudence lorsque nous faisons état des "nouveautés" de l'architeccture romane. Ce que nous croyons création n'est, peut-être que la répétition d'un parti architectural de la génération de la génération précédente, tout simplement inconnu de nous. De même, il nous parait difficile de mesurer si un effet traditionnel relève de la routine des gens de métiers ou du retour hardi d'un constructeur vers une pratique abandonnée depuis des générations" [Marie-Thérèse Camus, Sculpture romane du Poitou - Les grands chantiers du XI° siècle. Paris, 1992, p.40].
Quand on arrive sur le Sud Charente, partagé entre la Saintonge, l'Angoumois et le Périgord qui s'articulent quasiment en étoile à trois branches autour du confluent du Toulzot et de la Tude, on est surpris par l'impressionnante population d'églises romanes et celles peut-être dites romanes du XII° siècle en comparaison de la faible et très faible densité des églises du XI° siècle et l'inexistance dans la documentation disponible des églises et édifices chrétiens antérieurs au X° siècle - exceptés les nécropoles mérovingiennes déjà signalées dont la mise à jour reste encore très parcimonieuse et très pauvre en vestiges ornementaux et symboliques du culte chrétien si ce n'est le seul mode de sépulture - inexistantes ou pas encore découvertes ?
Sur la Charente des travaux ont été menés, toutes périodes confondues et sur la totalité du département indépendamment des division diocésaines, par Jean George et Alexis Guérin-Boutaud [Jean George et Alexis Guérin-Boutaud, Les églises romanes de l'ancien diocèse d'Angoulème. La Mothe-Achard, 2000] . L'église de Saint-Amant n'y bénéficie que d'une très succincte notice, ce qui est déjà remarquable tant ce monument semble avoir été "oublié" par les auteurs. Il est vrai que sa position est particulière dans le périmètre de l'importante église romane de Montmoreau dépendante du diocèse d'Angoulème alors que Saint-Amant-de-Montmoreau dépend du diocèse de Périgueux. Son étude archéologique est également très complexe.
L'importante étude de Sylvie Ternet sur les églises romanes du diocèse d'Angoulème reprécise certains traits importants de l'implantation religieuse et politique. En effet Sylvie Ternet, au sein d'une volumineuse documentation bibliographique et d'un inventaire de soixante quinze bâtiments étudiés, débute son premier chapitre en explorant une publication d'André Debord [André Debord, La société laïque dans les pays de la Charente - X°-XII° siècles. Paris 1984] par laquelle elle reprend la première implantation monastique de l'Angoumois au VI° siècle avec l'abbaye de Saint-Cybard "fondée par le saint du même nom", déjà signalée plus haut par Jean-Claude Papinot alors que l'organisation seigneuriale se construit sous les Carolingiens [Sylvie Ternet, Les églises romanes d'Angoumois - 2 volumes - Bâtisseurs et modes de constructions en Angoumois roman - Ouvrage publié grâce au soutien du Conseil général de la Charente - Préface de Marie-Thérèse Camus Professeur Honoraire d'Histoire de l'Art à l'Université de Poitiers. Paris 2006, p. 27 et 28.].
b.1.c. Les périodes gothiques
Comme déjà dit plus haut le XII° siècle est aussi le siècle de la naissance de l'art gothique et de sa fulgurante hégémonie. Le chevauchement des informations données dans le précédent paragrapghe et de celles exposées dans celui-ci est presque inévitable.
Actuellement , tous les chercheurs se rallient à l'article d'Erwin Panofsky pour un véritable démarrage de l'art gothique [Erwin Panofsky, "L'abbé Suger à Saint-Denis". Dans, Abbot Suger on the abbaye of Saint-Denis and its treasures. Princeton University Presse, 1946.]. Georges Duby nous brosse une fresque fleurie de la période " Sous son règne (Louis VII) débute en effet la floraison de cathédrales érigées selon les principes d'une esthétique que nous appelons gothique, mais qui, pour les contemporains, était "'l'ouvrage d'origine française". Opus francigenum, cette expression situait très précisément le lieu où la nouvelle manière des construire les édifices sacrés avait pris naissance. Le cœur de la vieille Francie, Saint-Denis-en-France. Suger en avait dressé le modèle : puisque selon Saint Jean et l'Aéropagite, Dieu est lumière, l'église doit être translucide [...] Enfin, dans les églises qui vinrent parsemer de signes superbes le domaine capétien se reflète la renaissance de la monarchie." [Georges Duby, Le Moyen-Âge - 987-1460. Villeneuve Saint-Georges 1988, p. 230 et 231.]
"D'un point de vue historique, l'architecture gothique, comme la théologie scolastique, témoigne d'une époque de renouvellement de la France sous le règne de Louis VI le Gros (1108-1137). Entre 1130 et 1140, cet esprit nouveau est également perceptible dans le domaine de l'architecture. La mort de Saint-Louis en 1270, lors de la croisade contre Tunis, est une date déterminante qui marque la fin de la grande période d'inovation architecturale, déjà amorcée par la politique du roi.
Après cette date, l'architecture gothique créera encore des oeuvres importantes - en France, et surtout en Angleterre, en Allemagne, ou en Espagne....En France, sous l'action de Saint-Louis le système politique s'est figé, tout comme l'architecture...En effet, la formation de la monarchie française entre 1130 et 1270 présente des rapports avec l'architecture, expression de la nouvelle organisation sociale. Nous expliquerons cela plus en détail en abordant l'histoire de l'abbaye de Saint-Denis et de son commanditaire, l'abbé Suger... Durant les cent premières années de l'histoire de l'architecture gothique, l'expansion du royaume correspond , à notre avis, à celle du domaine où le style gothique prédomine, précisément par cette imbrication plus étroite qu'on ne le suppose habituellement, et la politique et l'architecture" peut-on lire dans l'introduction à l'architecture gothique de Dieter Kimpel et Robert Sukale [L'architecture gothique en France 1130-1270. Traduit de l'allemand par François Neu, photographies d' Albert Hirmer et Irmgard Ernstmeier-Hirmer. Munich 1985, Paris 1990, p. 8].
"...Quand au second impératif des écrits scolastiques, celui qui exige "une organisation selon un système de parties et de parties de parties homologues", il se traduit graphiquement dans la division et la subdivision uniformes de toute la structure [...] Cette homologie fait apercevoir ce qui correspond à la hiérarchie des niveaux logiques dans un traité scolastique bien organisé. Si selon la tradition de l'époque , on divise la structure en trois parties principales, la nef, le transept et le chevet..." [Erwin Panofsky, Architecture et pensée scolastique. Traduction et postface de Pierre Bourdieu. Edition française de 1986, p. 103 et 104].
a.2 : Saint Amant.
Saint Amant est l'un des premiers fondateurs de vie monastique en communauté (cénobitisme) du diocèse d'Angoulème. Il est à noter qu'autour de Montmoreau une autre paroisse porte le nom d'un autre premier fondateur de la vie cénobitique du diocèse d'Angoulème : Saint Cybard. Saint-Cybard-de-Montmoreau se trouve sur la rive droite de la Tude, sur le diocèse d'Angoulème alors que Saint-Amant-de-Montmoreau, en quasi vis-à-vis sur la rive gauche de la Tude se trouve sur le diocèse de Périgueux.
Saint Amand (avec un "d") est aussi un saint de la Légende Dorée de Jacques de Voragine, évêque de Gènes au XIII° siècle. La date de 653 est donnée pour celle de la vie du saint.
Baudemond, disciple du saint, écrivit une vie de Saint Amant qui fut réécrite par Philippe de Harvengt au XII° siècle.
Hélinand est également un chroniqueur de la vie de Saint Amant.
La position du village de Saint-Amant en bordure d'un profond ravin sur le vallon du Toulzot peut-il avoir un rapport avec ce miracle donné à ce saint ? Alors qu'Amant cherchait un site pour fonder son monastère il fut entrainé dans la montagne par des brigands qui voulaient le tuer. Arrivés au sommet de la montagne un très violent orage éclata, tellement violent qu'on ne voyait plus rien autour de soi. Les brigands s'en remirent alors aux prières du saint et l'orage cessa. En reconnaissance les brigands rentrèrent chez eux en laissant la vie sauve à Amant.
On donne beaucoup de miracles à Saint Amant.
b.2. Une approche du site et du site dans l'église ; le rapport de la corniche à l'architecture.
L'église de Saint-Amant s'allonge et se dresse majestueuse et discrète, intégrée à son village en bordure du ravin verdoyant qui dégage un vaste panorama en demi-lune en face sud du monument dont la silhouette est de celles coutumières de la région : une longue nef unique ponctuée sur un tiers d'un gros clocher carré couvert en pavillon. En approchant du village les gros contreforts au pied du clocher ne sont pas de ces élégances qui incitent à la conversation. Le regard rebondit sur le programme sculpté d'un beau portail de la première renaissance; on risque un regard à l'intérieur non sans avoir hésité à se diriger d'abord sous l'arc devant la maison tour. Le site séduit par des concurrences de constructions pittoresques qui vous emmènent, si vous n'y prenez garde, au perron de la cure fermée depuis bien longtemps. On descend, on remonte, on tourne autour de l'église par un informel chemin gazonné et fleuri qui vous ramène au soleil de l'occident d'abord ouvert sur le vaste panorama par lequel on entre dans la nef par une une très petite porte sans aucun ornement, stricte comme une none coiffée d'un grande fenêtre non moins souriante : une allée d'arbres ombrage le chemin. Et c'est beau, simple et beau comme la foi...
Quels mystères cet écrin, graduellement rencontré du site au village à la modestie de ses ornements, renferme t-il ?
Après avoir dépassé une vaste nef, vide ou les noms des fidèles sont encore inscrits en noir sur des plaques blanches émaillées sur les rangées des chaises aux bois solidaires, couverte d'un plancher, l'approche du chœur est plus chaotique et le regard monte sous la coupole du clocher, tourne, redescend sur une peinture murale qui fut sans aucun doute un chef d'oeuvre de l'art médiéval mais qui n'est déjà presque plus. Et puis le regard erre, rêve et rencontre d'autres regards hauts perchés aux angles d'une corniche qui ressemble un peu - comme si elle avait encore ses couleurs des mouchoirs à carreaux ou demeurée blanche immaculée - à ces bordures de cheminées naperonnées-festonnées de nos modestes cuisines des hameaux.
c. c.2 : iconographie. Approche d'identification. Une improbable imposte en réemploi.
Cette imposte n'est pas une corniche et cette corniche n'est pas une imposte, c'est le réemploi de deux angles sculptés qui appartenaient à un même programme sculpté et qu'on a coupés pour les ajuster aux dimensions du pilier qui a projeté en avant le pilastre insuffisant pour monter les pendentifs à la base
de la coupole appareillée, percée d'un oculus pour tirer les cloches.
On peut donc avancer sur deux angles d'une seule frise, récupérés sur un sarcophage, soit en bordure de couvercle soit en corniche de la cuve.
Le profil incliné de la frise serait plus en faveur de la corniche supérieure de la cuve qu'en celui d'une bordure de couvercle d'autant plus que le bandeau plat présente une partie supérieure plate de réception plus que d'un départ de couvercle. Mais cette partie plate peut très bien avoir été retaillée si les marqueurs nous orientent dès maintenant vers des éléments d'un sarcophage mérovingien ou de l'antiquité tardive.
En effet la tradition chrétienne autour de la création du cérémonial de la messe voulait qu'on réutilise les tombeaux des saints ou d'illustres personnages pour en faire des autels dont la définition est "une table sur laquelle est célébrée la messe" [Jean Favier, Dictionnaire de la France médiévale. Paris, 1993, p.94]
(Certains auteurs, en référence à l'iconographie de la "Messe de Saint-Grégoire"affirment que le cérémonial de la messe est une création de Grégoire le Grand, 64° pape de l'Eglise. Pontificat de 590 à 604)
Pour les églises du haut-moyen-âge et principalement carolingiennes, Carol Heitz donne une série de rapports entre l'architecture et la présentation des reliques en une allée bordée de ces précieux vestiges, allant de l'entrée au fond du sanctuaire : "Toutes ces reliques [...] Elle se trouvait ainsi sur le chemin de ceux qui pénétraient dans l'église et qui cherchaient, avant même l'office, le contact, à la fois purificateur et réconfortant des reliques [Carol Heitz, Architecture et liturgie à l'époque carolingienne. Paris, 1963, p. 104].
"La multiplication et le déplacement des reliques, surtout sous forme de brandea et des pignora allaient de pair avec un autre usage : celui de déposer dans les églises, souvent dans les endroits les plus divers - les murs, les portes, les arcs des fenêtres, les chapiteaux - mais plus particulièrement sous l'autel, afin de souligner le parallélisme existant entre la Passion du Christ et celle de ses témoins. Déjà le Concile de Paris de 614, dans son canon 2, interdit de consacrer un autel ailleurs que dans une église où étaient enterrés des corps de saints" [Marcel Durliat, 1985, op.cit., p. 42]
François Heber-Suffrin et Christian Sapin, nous entraîne vers d'autres us et coutumes vis-àvis des tombeaux et des reliques. "Plusieurs traces archéologiques, reconnues lors de fouilles récentes de 2003-2008, permettent de reconstituer l'évolution de l'environnement de la tombe, depuis le IV° siècle.
A Echternach, adns le chevet de l'abside, fondée en 698...deux états ont été proposés pour l'aménagement primitif: soit la tombe devant et en partie sous l'autel majeur de l'église, entourée d'un chancel de pierre, soit en position surélevée, l'autel diposé devant la tombe [...] sarcophage reliquaire...La place laissée entre l'autel et l'abside conviendrait dependant bien à une position initiale qui n'est contredite ni par l'archéologie, ni par la typologie de la cuve du sarcophage". Puis ils reprennent leur exposé en revenant à cette idée primordiale des Saints intercesseurs entre les hommmes et Dieu. Ceci justifie une forme d'évolution des pratiques autour du sacrifice de la messe, c'est-à-dire que les reliques d'abord présentes dans la table de l'autel vont postérieurement être placées dans des reliquaires en arrière plan de l'autel [François Heber-Suffrin et Christian Sapin, 2021, op.cit., p.141 - 143]. Ce qui nous ramène vers la position et la fonction initiale du tombeau du Saint citée comme autel de la messe par Jean Favier.
A travers ces analyses d'auteurs nous pouvons entrevoir une origine très probable du site où ces fragments de corniches ont été récupérés dans l'église, extraits pour être réinstallés, réemployés, conservés dans une autre organisation liturgique de l'église, puisque nous serons amenés à remarquer (au fur et à mesure de l'étude archéologique du monument sur la prochaine page de ce blog) qu'on a replacé ces vestiges en vis-à-vis d'une fresque du mur Sud dont certains indices rares - vu l'état de la peinture murale - orientent vers une crucifixion en deuxième état de la peinture murale qui en recouvre une première. Nous entrerions aussi dans l'évolution de la récupération ou de la réinterprétation d'un thème par des hommes du moyen âge qui auraient eux-mêmes déjà identifié ces fragments comme ceux de la Sainte-Face miraculeusement recueillie sur une étoffe et installée dans le cycle de la Passion auquel elle n'appartenait initialement pas. En récupérant les fragments de sculptures c'est aussi une façon de récupérer les valeurs symboliques qui leurs sont attachées et de leur redonner une dimension liturgique au sein de l'édifice : à défaut du tout on aurait les fragments investis des mêmes valeurs sacralisées.
Les valeurs symboliques se retrouvent au coeur de ces évolutions et mouvements au sein du monument, de l'architecture.
"Symbole ...."Signe de reconnaissance". Primitivement....Le mot ne se trouve dans la Bible qu'en Sg 16,6 pour désigner le serpent d'airain qui devait être regardé par les Hébreux pour être sauvés, comme "symbole du salut".
2. Le symbole est en général ce par quoi se constitue une convention de langage, un gage de reconnaissance mutuelle entre des libertés. C'est une réalité signifiante, introduisant un monde des valeurs qu'elle exprime et auquel elle appartient.
3. Le symbole ne doit pas être identifié à l'allégorie (par exemple la balance pour la justice), car en lui la réalité est première par rapport à l'idée. Ni avec forme ou structure, car son contenu est inséparable de l'expression . Ni avec signe, car le symbole participe à ce qu'il représente.
4. On distingue deux types de symboles : le symbole traditionnel, constitutif de la société (ainsi le langage, ainsi l'eucharistie) et le symbole conventionnel, produit par la société (ainsi les nombres sept ou douze).(p507)
Eucharistie : "faire plaisir, accorder une grâce". De l'action de grâces prononcée sur le pain et la coupe par Jésus, puis par les chrétiens, où on est venu au II° s. à appeler "eucharistie" l'action de graces qu'est par excellence le repas du Seigneur."
[Xavier Léon-Dufour, Dictionnaire du Nouveau Testament. Paris, 1975, p. 246 et 507.]
c.3 : masques et figures humaines, traditions iconographiques mérovingiennes.
A ceci il faut ajouter que la tête humaine sous différentes formes, de face ou de profil, de masques aux riches familles iconographiques dont celles en rondes bosses dépourvues de pilosités, est un des grands thèmes de la tradition iconographique mérovingienne. On y trouve des formations assez étonnantes comme celle de Jésus en habit militaire et celles liées aux sépultures dont des évocations partielles en supposés portraits des défunts [E.Salin La civilisation mérovingienne d'après les sépultures, les textes et le laboratoire. Quatrième partie. Les croyances - conclusions - Index général. Ouvrage publié avec le concours du Centre National de de la Recherche Scientifique. Paris, 1959, p. 258 à 420]. Ci dessous deux exemples produits par E.salin, p.168 et 401 :
3 . Iconologie et sources littéraires
a.3 . "La doctrine des symbolistes du Moyen-âge" , citation d'auteur.
"...Ce symbolisme s'étend à la nature, comme à l'histoire. Tout est ramené au Christ, à l'Homme-Dieu, personnage central vers lequel tout converge... [...]...Selon saint Thomas d'Aquin (1225, 1274), qui formule la pensée christocentrique du Moyen-âge, ni les hommes dont le souvenir est consigné dans l'histoire, ni les objets que nous offre la nature, n'ont de valeur en eux-mêmes, mais seulement dans la mesure où ils conduisent au Christ: in quantum ducunt ad Christum.
Un des meilleurs interprètes contemporains de la philosophie thomiste, Etienne Gilson, a condensé l'essentiel de cette doctrine dans une formule frappante [E.Gilson, la Philosophie du Moyen-âge. Paris, 1922] : Pour un penseur de ce temps, expliquer une chose consiste toujours à montrer qu'elle n'est pas ce qu'elle paraît être, qu'elle est le symbole et le signe d'une réalité plus profonde, qu'elle annonce et signifie autre chose". [Louis Réau, Membre de l'Institut, Iconographie de l'art chrétien - Tome premier Introduction Générale. Paris, 1955, p. 61].
b.3. Les sources bibliques.
Cette frise Ouest plus longue que la frise Est est celle qui est à la tête du sarcophage. En fait de "vigne" elle est un avatar du chapiteau corinthien qui devient "vigne" simplement parce qu'il y a une grappe de raisin, les fleurs n'étant pas celles de la vigne qui porte ses fleurs sur les grappes avant la formation des grains. Nous sommes dans le monde du symbole . Ce symbole est celui de Jésus : "Jésus est la vraie vigne sur laquelle doivent rester attachés les pampres (grec Klémata) que sont les croyants.... En continuité avec l'A.T., Jésus dépeint volontiers Dieu sous les traits du propriétaire d'un vignoble [ X.Léon-Dufour, 1975, op.cit. p. 545].
"Le lieu de la plantation est le paradis; chaque plan représente un baptisé. Celui qui plante est le seigneur...On peut rapprocher des Odes de Salomon un passage de l'évangile de Vérité retrouve à Nag Hammadi...En tout cas la connotation baptismale et catachétique du thème est frappante. Il y a la plantation qui correspond au baptême " [Jean Danielou, Les symboles chrétiens primitifs. Ligugé, 1961, p. 34].
Sur le couvercle de sarcophage N°13 d'Antigny (iconologie précédente) la croix en chef du sarcophage est le symbole du baptême juste avant la mort.
"Nous sommes partis du baptême comme effusion d'eau vive figurant l'effusion de l'esprit [...]Les eaux créatrices sont en relation avec le thème de l'eau vive en tant qu'elles produisent des être vivants . C'est là un aspect caractéristique de la typologie baptismale [...] Si l'eau vive signifie l'Esprit, le baptême donne la vie de l'Esprit" [J.Danielou, 1961, op.cit., p. 60 à 63]
Cette composition est en lien plastique avec une figure ronde, quasi "joviale", les yeux ouverts, enveloppée d'un linge qui ne laisse passer aucun signe de pilosité. Figure en acrotère qui va être reprise par un second enveloppé de la figure - en composition gigogne en quelque sorte - qui oriente vers une réelle continuité des deux faces de la corniche ; d'un côté la vigne et de l'autre la nappe, le suaire ou le voile selon qu'on se situe au niveau de la corniche supérieure de la cuve - dans ce cas le suaire s'échappe de la cuve en un plissé géométrique stylisé - ou au niveau d'une bordure de couvercle , dans ce cas c'est une nappe qui tombe en plissé de la partie supérieure du sarcophage qui, une fois récupéré en autel, aura sa nappe retombant en plissés réguliers géométrisés.
Pour comprendre cette composition articulée en acrotère par une tête ronde, imberbe, presque souriante il faut en revenir aux types de construction des images mérovingiennes et même de l'antiquité tardive ou paléochrétiennes. Est-ce en revenir à l'iconographie ? Certes, mais c'est un retour nécessaire.
Le déplié de l'image de la corniche nous articule sur la réflexion d'André Grabar : "J'ai parlé dans l'introduction de la relation étroite qui s'établit entre iconographie et langage [...] La part créative personnelle, dans une image exécutée par un peintre ou par un sculpteur, est en fait minime : tout le reste appartient au vocabulaire courant des arts visuels, c'est-à-dire au langage d'usage général ou encore, parfois, à un langage technique spécial, déjà constitué. En procédant ainsi le créateur sera compris de son entourage, ce qui est le but évident de toute expression, en images comme en mots. Cette règle générale fut suivie par l'iconographie [...] Cette classe comprend la plupart des formules de la représentation de la figure humaine, sujet central de toutes les anciennes images chrétiennes y compris celle du Christ, de la Vierge et des saints . [...] On a dit que le Christ imberbe était conforme à l'art gracieux et superficiel de l'époque impériale, qui substituait par exemple, , des putti ou des bébés aux participants réels et adultes d'une activité quelconque. Sur les images païennes et chrétiennes ces enfants remplacent les adultes d'une activité quelconque [...] Le premier système que nous avons étudié...employait des termes iconographiques directs, qui définissaient chacun une idée théologique (exactement comme comme un terme de la langue écrite ou parlée fait d'un seul mot ou d'une seule phrase brève et simple)...dans d'autres exemples qui vont suivre, les images sont faites de la juxtaposition de deux ou de plusieurs locutions iconographiques."[André Grabar, Les voies de la création en iconographie chrétienne. Paris, 1994, p.61, 62, 207 et 231].
Avec cette citation d'André Grabar nous avons toute les premières clés qui nous permettent de préciser une nouvelle fois une sculpture très anciennes des premières iconographies chrétiennes également conforme à cette autre remarque d'André Grabar à la page 32 du même ouvrage : "Il existe évidemment des différences essentielles entre les programmes funéraires païens et chrétiens. Tout d'abord c'est le thème de la mort qui est absent de l'art funéraire chrétien...Les chrétiens évitent systématiquement ceux des sujets empruntés à l'Ancien Testament ou à l'Evangile qui traitent d'une mort quelconque; c'est sans doute la victoire du Christ sur la mort qui excluait ce thème de l'iconographie paléochrétienne ".
Il est donc vain de rechercher dans les première représentations du Christ un "portrait" du Christ d'autant plus que l'iconographie se constitue au moins 200 ans après la crucifixion.. Ce sont des représentations symboliques identifiables par les groupes sociaux qui vont engendrer les différentes constructions iconographiques de l'image du Christ suivant les époques, depuis ces premières formes dont nous avons ici un remarquable exemple à celles qui s'élaboreront par la scolastique et les artistes romans et gothiques et encore plus tard de la Renaissance. La recherche d'une véritable icône peut donc devenir un thème théologique essentiel dès les premières formes de la constitution de l'iconographie chrétienne..
La recherche de l'icône primordiale, de la véritable icône, s'est progressivement associée à l'idée d'une image du christ qui aurait été recueillie sur une étoffe, cette étoffe qui enveloppe ici chaque tête en acrotère sans que nous puissions avec certitude identifier cette étoffe - aux plissés retombants - à un voile couvrant le sarcophage qui va devenir l'autel, la table de célébration de la messe, ou au suaire qui en enveloppé le Christ : nous sommes là sur des fondements de la formation des images chrétiennes achiropoètes, la Véronique et le Saint-Suaire.
C.3: le rapport aux apocryphes
Avant d'entrer dans les rapports de syntaxe aux apocryphes précisons les sens bibliques des vocabulaires que nous allons rencontrer en lien avec le Saint-Suaire et principalement avec la Véronique puisque la corniche de Saint-Amant n'établit de rapport de la face - "Sainte-Face"- qu'avec l'étoffe plissée et la composition en symbole de la Vraie Vigne soit de Jésus, dont nous avons déjà développé toute la symbolique en iconographies vivantes conformément aux remarques et analyses d'André Grabar.
Les références bibliques seront une fois de plus les définitions des vocabulaires dans le Dictionnaire du Nouveau Testament de Xavier Léon-Dufour.
" Etoffe : Le NT mentionne plusieurs sortes d'étoffes (au sens générique gr :rhakos) qui peuvent être de lin, de laine, de pourpre, d'éacarlate : bandelettes, draps, linceul, linge (mouchoir, serviette ou tablier), nappe, suaire, voile. MT 9,16 (=MC 2, 21).
Bandelettes gr.Keiria: "sangle, bandage, bande" (Jn 11,44) et othonien "pièce de linge" (de othoné, linge fin) (Luc 24, 12; Jn 19, 40, 20, 5-7 ---- ensevelir
Drap gr. sindôn. Tissu de lin ou de laine, pouvant servir de vêtement ou de voile. Mc 14, 51s. ----- linceul.
Linceul gr. sindôn. Grand morceau de toile fine, dans lequel on enveloppe les cadavres pour les ensevelissements Mt 27,59 (Mc 15,46 = Lc 23,53).-----drap.
Linge gr. lention (du lat. linteum). Etoffe pouvant servir de tablier ou de serviette de toilette Jn 13,4s
Nappe gr.othoné. Celle que vit Pierre n'était pas un linge destiné à couvrir la table du repas, mais une grande pièce de toile Ac 10,11; Jn 12,3
Suaire gr. soudarion ( emprunté au latin sudarium). Sorte de foulard ou de mouchoir, destiné à essuyer la sueur. Il pouvait aussi servir à enfouir de l'argent ou à envelopper la tête des morts Ac 19,12 - Lc 19,20 - Jn 11, 44; 20,7
Voile en gr. Kalymna (de kalypto : "couvrir"). Tissu recouvrant la tête et souvent le visage.
En public la femme juive portait ordinairement le voile de tête selon la coutume orientale (Is 47,2) dont Paul est l'écho. On discute sur les raisons de cette coutume : pudeur (Gn 24,65; Ct 4,1.3) avant le mariage (Gn 29, 23.25), moyen pour n'être pas reconnue (Gn 38, 15.19; 1 P 2,16) , signe d'appartenace à un mari (1 Co 11,9s). S'opposant aux coutumes des cultes païens à mystères, Paul prescrit le voile dans les assemblées lithurgiques (1 Co 11, 5s.13).
Le voile peut servir à masquer un visage, soit pour se moquer de quelqu'un [Mc 14,65 (= Lc 22,64)], soit pour se protéger des reflets dela gloire de Dieu (Ex 34,33-35; 2 Co 3,13-18). ---- femme-----vêtement.
Voile du Temple Dans le temple d'Hérode, comme jadis dans le sanctuaire nomade des Hébreux, un rideau (gr. katapetasma) fermait l'accès au S, et u autre au Saint des Saints (He 9,3). C'est le premier qui , selon l'Epitre aux Hébreux, se déchira à la mort de Jésus (Mt 15,38 = Lc 23,45 ; He 10,19s). Sa déchirure signifie l'abrogation de l'ancien culte et surtout l'accès devenu libre au sanctuaire céleste."
Cette énumération due à la très grande science biblique de Xavier Léon-Dufour est précieuse car elle nous re-situe l'histoire du voile de Véronique non pas dans une création ex-nihilo de poète des premières formations iconographiques chrétiennes mais au contraire dans une sorte de variations archaïques sémantiques et iconographiques des vocabulaires bibliques ayant franchi le monde du visible, projetés dans le réel par le ciseau du sculpteur . Et encore, c'est cette nouvelle forme, tout juste découverte en cette fin d'avril 2021 dans cette église de Saint-Amant-de-Montmoreau au sud Charente, loin des foyers orientaux, qui nous permet de remonter dans ces sources bibliques.
c.3.1 : Le mandylion du roi Abgar - Edesse.
Je repars ici sur une partie de mon introduction - sur ce blog - à ma première étude du thème de la Véronique La Véronique - Image ou non de la représentation
http://coureur2.blogspot.fr/2012/12/la-veronique-de-la-legende-lart.html .
Louis Réau [Iconographie de l'art chrétien - II - Iconographie de la Bible - Chapitre III - Les prétendus portraits de Jésus. Paris, 1957, p.17 et suivantes - Iconographie de l'art chrétien - III - Iconographie des saints. Paris, 1959, p. 1314 "Véronique n'est qu'une variation du mandylion d'Abgar"]. Cet auteur divise et réunit en fin de compte l'iconographie de Véronique en deux temps : le mandylion du roi Abgar d'Edesse et La Véronique. Edesse est une ville d'Asie Mineur, en Mésopotamie, actuellement en Turquie sous le nom d'Urfa.
Le mandylion du roi Abgar d'Edesse serait une des plus anciennes formations de l'icône byzantine, au VI° siècle, à partir de la peinture antique précise Etienne Coche de la Ferté [ E.Coche de la Ferté, L'Art de Byzance. Paris, 1981. Au chapitre sur l'histoire de l'icône byzantine, p.70 à 72]. André Grabar n'ignore pas ces programmes iconographiques : "Il y a enfin ce qui à nos yeux de modernes est l'expérience principale, celle des fresques de la synagogue de Doura, que le regretté Pr C.H.Kraling a eu probablement raison de attacher au fort regain des activités juives dans plus d'un domaine culturel, dans et autour d'Edesse, capitale d'un des petits royaumes sémitiques limitrophes de l'Empire romain et de la Perse." [ A.Grabar, 1994, op.cit., p. 50].
Le travail des traducteurs des apocryphes, leurs publications et leurs commentaires, apportent de nouveaux éclairages sur les productions des écritures et des icônes chrétiennes. Une réunion d'évangiles apocryphes publiée en 1983 [France Quéré, Evangiles apocryphes - Réunis et présentés par France Quéré. Paris, 1983] précède de dix ans la traduction et la présentation par Alain Desreumaux de la doctrine d'Addaï, apôtre contemporain du roi Abgar à Edesse [Alain Desreumaux, Histoire du roi Abgar et de Jésus. Présentation et traduction du texte syrriaque intégral de la Doctrine d'Addaï par Alain Desreumaux , Chargé de Recherches au CNRS et en appendice Traduction d'une version grecque par Andrew Palmer , Lecturer, School of Orient and African Studies, Londres - Traduction d'une version éthiopienne par Robert Beylot, Chargé de recherches au CNRS. Paris, 1993].
La traduction d'Alain Desreumaux nous entraine dans les paradoxes et les conflits des rapports vécus du temps de Jésus - par la cour du roi d'Edesse - entre l'enseignement et la diffusion de la doctrine chrétienne et sa représentation tant par le verbe que par l'image. Les productions des sculpteurs et des peintres, ces images fabriquées par l'homme y sont exposées comme impies (p.89, 90, 91) p.105 et 106 on lit : "Tenez vous à l'écart de ces païens car ils adorent les êtres créés et les êtres fabriqués...c'est pour que les créatures ne soient plus ni adorées, ni honorées...La volonté de celui qui a créé les créatures a délivré les hommes du joug de l'idolâtrie des créatures. Vous savez que quiconque adore les oeuvres du roi avec le roi, trouvera la mort par le glaive du fait de sons adoration". Si par d'autres passages le texte proscrit la diffusion de la doctrine chrétienne par la violence, la question de la représentation demeure un thème central.
Or le roi Abgar (il ne peut en principe s'agir que d'Abgar V contemporain du Christ ) adore une icône : le portrait envoyé par Jésus en substitut de son impossibilité à se rendre en personne à Edesse pour la guérison miraculeuse du roi.
En revenant sur l'introduction d'Alain Desreumaux (p. 31) : "...Le débat est philosophique et la question est apologétique : comment est-il possible de voir un dieu ? ... La Doctrine d'Addaï ne propose aucune démonstration. Elle produit simplement des faits de la doctrine qu'elle veut enseigner. L'introduction de l'épisode du portrait du Christ est à cet égard significative . L'icône constitue la réponse à la question des deux princes, réponse que la prédication de l'apôtre traduit toutefois en clair : "Le corps est la pourpre pure de sa divinité illustre ; c'est grâce à lui que nous pouvons voir sa divinité cachée (...] (p.33) ...Doctrine d'Addaï , celle-ci représentant Jésus le bon médecin, guérissant non par les drogues, mais par sa parole, envoyant une vraie promesse et non une lettre , un simple portrait , un vrai disciple qui convertit le roi...[ L'auteur continue en présentant un exposé de mise en concurrence des pratiques manichéennes qui utilisaient aussi la force du portrait et l'exégèse chrétienne du Christ roi ]...[...] (p. 39) L'image du Christ commence sa carrière avec la Doctrine d'Addaï ; puisque ce texte en parle, il est vraisemblable qu'il existait. En tout cas il est le seul texte qui nous en conserve la mémoire... Dans la doctrine d'Addaï, le portrait bien réel de Jésus homme tient son existence matérielle de la simple facture humaine tandis que la parole du Christ Dieu ne se donne pas comme Ecriture ...le portrait est une preuve humaine qui appuie la divine parole guérisseuse et protectrice... (p. 40) ...Au dernier stade, dans les traditions grecques, arméniennes et arabes, le portrait est une image non faite de main d'homme puisque c'est le Christ lui-même qui imprime sa face sur un voile, tradition qui en Occident latin, deviendra celle de la Véronique".
En continuité de la version sus citée, Andrew Palmer nous donne la version grecque qu'il évalue rédigée vers 628/629 par laquelle il écrit ceci (p.140) "...on lui donna un essuie-mains, il se lava et s'essuya le visage. Il fixa son image sur le linge et le donna à Annani (le messager du roi Abgar qui avait apporté sa lettre à Jésus) en disant : "Remets ceci à celui qui t'a envoyé et rapporte-lui cette réponse: "Paix à toi et à ta ville. Parce que je suis venu dans le but de souffrir pour le monde, et de ressusciter les premiers parents. Mais après que j'aurai été élevé dans les cieux[...] Il existe un autre texte du cycle d'Abgar...les manuscrits qui donnent cette version ne sont pas antérieurs au XI° siècle...".
A la participation d'Andrew Palmer succèdent celle de Robert Beylot avec la version éthiopienne. Le pouvoir de l'image non faite de main de l'homme est repris par le texte Grec; image à fonction apotropaïque "qui va désormais protéger la nouvelle Edesse" (A.Palmer, op.cit, 1993, p.136).
Au total "la légende a été transmise en grec, en syriaque, en copte, en éthiopien, en arabe, en arménien, en géorgien et en slavon" [A. Desreumaux, 1993, op.cit., p. 7].
Nous allons revenir sur le recueil de l'image sur une étoffe, car c'est une question centrale pour l'identification de la corniche de Saint-Amant-de-Montmoreau à partir des textes diffusés autour de la datation évaluable de cette sculpture et des aspects iconographiques des premières images chrétiennes dont la très savante étude étude d'André Grabar nous a livré les clefs utiles.
Dans le texte de la Doctrine d'Addaï le voile est une coiffure féminine impériale alors qu'il va devenir dans les versions postérieures le voile d'une servante et plus tard celui des sœurs dans les monastères.
Le voile sur lequel est recueilli le portrait de Jésus vivant, envoyé au roi Agbar, est qualifié de "Mandylion". C'est un mot grec qui signifie "mouchoir" ou "petit carré d'étoffe" en grec moderne. La "mantyla" ou "mandila" désigne un grand mouchoir, ou foulard, avec lequel les femmes se couvrent la tête, la gorge ou les épaules. C'est ce même mot qui désigne la couverture de la Sainte-Table, c'est-à-dire la nappe d'autel pour la célébration de la messe. On comprend alors toute l'importance que ces filiations iconographiques et linguistiques ont pour une approche plus pertinente de l'iconographie de la corniche de Saint-Amant-de-Montmoreau.
La Doctrine d'Addaï donne encore cette précision (p.109) : "La raison et l'intellect de l'âme ne périssent pas, parce qu'y est peinte l'immage immortelle de Dieu... L'Ordre tout entier...quiconque les voyait courrait à leur rencontre pour demander repectueusement leur salut...De la sorte leurs visages publiaient la prédication de leur doctrine auprès de tous" (p.113-14)
Les versions éthiopiennes que Robert Beylot apporte à notre connaissance sont nombreuses et un texte syriaque est signalé.
En 944 l'image est transférée à Constantinople alors qu'en 726 l'Empereur Léon avait fait interdire la fabrication et le culte des images du Christ, ce qui orienterait vers une production significative d'images du Christ pendant la période mérovingienne, voire paléochrétienne.
En revenant vers André Grabar (op.cit, p.120) "Rappelons enfin que pour les chrétiens de l'antiquité tout portrait religieux posait un grand problème d'ordre moral, car plus que toute autre image il rappelait les dangers de l'idolâtrerie". L'auteur développe ensuite l'histoire du portrait de l'Apôtre Jean, rédigée au II° siècle.
C'est dire à quel point la question des portraits est centrale dans la formation de l'iconographie chrétienne qui se dégage de l'iconographie polythéiste et impériale antique. En effet, il n'est pas inutile de prolonger nos regards sur les croisements des civilisations et des cultures au début de l'ère chrétienne. En prenant comme support une publication ancienne du musée Guimet [E.Guimet, Les portraits d'Antinoé - Annales du Musée Guimet - Bibliothèque d'art - Tome cinquième. 1912] nous retrouvons des iconographies de sarcophages avec une rubrique importante consacrée aux portraits classés en trois familles : Portraits en plâtre, Portraits peints sur bois, Portraits peints sur toile. Les répertoires géométriques et floraux y ont aussi une certaine importance. Dès les premières pages de cette grande plaquette aux magnifiques illustrations anciennes en couleur on peut lire (p.7) : "Au point de vue de l'ornementation , M.Gayet, dans son catalogue, divisa cet espace temps en quatre périodes "La première, de la fondation d'Antinoé par l'empereur Hadrien, l'an 140 de notre ère, à l'avènement de Constantin, la seconde, du règne de Constantin à l'introduction de l'Islam en Egypte...". Mais les choses ne s'arrangent pas aussi simplement que cela et le classement chronologique ne se superpose pas très exactement sur le classement géographique...Puis l'apparition des fleurs à quatre pétales , des croix, des swasticas, des corbeilles de fruits, de pains et des vases à vin; mais les personnages mythologiques persistent, et, sans les attributs chrétiens , on se croirait encore en présence du répertoire du paganisme...C'est surtout sur les grands châles qui servaient de suaires que ces ornements apparaissent".
Ainsi, nous voici ramenés dans le contexte de la production des portraits liés à l'ensevelissement et à l'éternité sur un carrefour de civilisations d'où vont émerger les grandes religions monothéistes. La chrétienté doit affirmer et définir sa propre identité par l'image de son Dieu, par sa Véritable Icône miraculeusement imprimée sur une étoffe et douée de toutes les valeurs apotropaïques dont les anciennes idoles étaient les dépositaires.
Le portrait de Jésus Roi des Juifs était donc une iconographie essentielle, nécessaire au culte. Qu'elle fut miraculeusement recueillie sur le voile, sur le châle, sur le suaire et ensuite qu'elle fut associée à la crucifixion et à la résurrection sur la table de l'autel sacrificiel de la messe, en accompagnement de la croix du baptême et d'autres symboles de la résurrection comme la vigne par le vin, est en soi, du point de vue d'un laïque, tout à fait "orthodoxe".
Lorsque l'empereur Léon interdit les représentations du Christ il faut aussi y associer l'image de Jésus sur la Croix : d'un côté on ferait du portrait de Jésus une Légende et de la crucifixion un fait historique par le seul argument que le portrait n'appartient pas aux récits des évangélistes... Ainsi la question du "portrait" de Jésus associée à son corps sur la croix n'est pas un sujet de débat sauf par le Saint-Suaire de Turin la seconde formation achiropoète. Comme quoi l'image de Dieu est bien plus un phénomène essentiellement mental et spirituel lié dans ses représentations aux pratiques artistiques en vigueurs aux époques de leurs créations (passage dans le réel du visible - néoplatonisme en quelque sorte)) qu'une question de ressemblance à une incarnation temporelle connue et transmise, mortelle et supliciable : nous retournons sur les valeurs symboliques des formations iconographiques intemporelles chrétiennes en rapports interdépendants avec les pratiques et styles artistiques des époques associés aux phénomène de la Resurrection et de l'immortalité de l'âme : tel portrait peint par Giotto n'aura rien de commun, ni en style ni en valeurs documentaire, avec tel autre peint par David, pour donner une vision un peu grossière mais significative de la question de la fidélité des représentations. Ce qui nous ramène au style de la corniche de Saint-Amant qui correspond aux descriptifs avancés par André Grabar et présentés plus haut pour les périodes paléochrétiennes et mérovingiennes.
A ceci il faut ajouter que la tête humaine sous différentes formes, de face ou de profil, de masques aux riches familles esthétiques dont celles en rondes bosses dépourvues de pilosités, est un des grands thèmes de la tradition iconographique mérovingiennes, dont des évocations partielles en supposés portraits (dont de Jésus) appartient à l'iconographie mérovingienne tel que l'expose Edouard Salin La civilisation mérovingienne d'après les sépultures
c .3.2. La Bible de Roger d'Argenteuil - Les tuniques dont celle d'Argenteuil. XIII° siècle.
Il s'agit d'une bible rédigée en français dont le manuscrit déposé à la Bibliothèque Nationale de France est daté du XIII° siècle. Les rares informations que sont disponibles à son sujet évoquent un mélange de textes bibliques de la traduction de Saint-Jérôme, insérés dans des textes apocryphes dont un sur la Véronique ou la Saint-Face.
Les différents tuniques ou capes attribuées en vêtements de Jésus et conservées en pieuses reliques dans des chasses somptueuses ne sont pas scientifiquement vérifiées authentiques. De toute façon on ne peut pas les classer dans la famille des images achiropoètes car elles ne sont pas des images du Christ mort (suaire), ni de Jésus vivant (portrait de Jésus).
c.3.3. La Véronique de la Légende Dorée de Jacques de Voragine (1228-1298), évêque de Gènes. Le XIII° siècle
La bibliographie très fournie d'Alain Desreumaux montre à elle seule à quel point l'histoire du roi Abgar et de Jésus a passionné et questionné tant les historiens que les biographes que toutes sortes de savants chercheurs et auteurs religieux ou laïcs.
Les mondes antiques, barbares, les péripéties des évangélisateurs alimentent une littérature merveilleuse abondante, qui, à partir du XIII° siècle, va fonder, par la scolastique, la martyrologie et le culte des saints dans un nouveau panthéon : celui de la chrétienté que le génie des ornemanistes, des poètes, des peintres, des sculpteurs, des graveurs, des enlumineurs, des émailleurs et des orfèvres tout autant que des peintres de vitraux vont exalter et faire entrer dans le quotidien des populations dont l'habitat se cristallise autour des églises et des cathédrales massivement construites par une organisation des évêchés parfois minuscules, comme dans les Alpes, qui gèrent à la fois le temporel et le spirituel, portés par le pouvoir seigneurial titulaire des cultes, l'épée serviteur de la ferveur religieuse.
Dans la Légende Dorée La Véronique est un chapitre de "La passion du Seigneur". La Véronique, dans le contexte de la recherche par Volusien du médecin capable de guérir Tibère Véronique y apparaît comme une amie de Jésus : "Volusien s'informa auprès d'une Dame, nommée Véronique, qui avait été amie avec J.C. où l'on pourrait trouver le Christ Jésus : Véronique lui dit "Ah c'était mon Seigneur et mon Dieu : trahi par jalousie, il fut condamné à mort par Pilate, qui l'a fait attacher à la croix..."...Véronique répondit "Alors que mon Seigneur parcourait le pays en prêchant , comme j'étais privée, bien malgré moi, de sa présence, je voulus faire exécuter son portrait, fin que lorsqu'il ne me serait plus donné de la voir, je pusse au moins me consoler en regardant son image : alors je portais la toile au peintre, quand le Seigneur vint au-devant de moi et me demandais où j'allais. Lorsque je lui eu exposé le sujet de ma course ill me demanda la toile, et me la rendit avec l'empreinte de sa face vénérable. Si donc votre maître regarde avec dévotion les traits de cette image, à l'instant il aura l'avantage de recouvrer la santé." (suit l'épisode de la tunique de Jésus). En somme la Légende Dorée reprend l'épisode de l'image miraculeusement imprimée sans la main de l'homme, dans la recherche d'uné guérison non moins miraculeuse, liée à la dévotion des pensées en regardant l'image. C'est donc d'un mode opératoire spirituel dont il s'agit par le miracle deux fois opéré : une fois par Jésus lui-même et l'autre par le demandeur de guérison. L'homme est un être actif de sa spiritualité tout comme Véronique est une femme qui va demander au peintre de peindre le portrait d'un homme absent et qui reproduira ses absences. C'est à la mémoire que Véronique fait premièrement appel pour briser la douleur de l'absence par une image de substitution que vient briser la brusque et inattendue apparition de Jésus qui devient lui-même acteur de son image fixée sur la toile. Les apparitions miraculeuses ne procèdent pas différemment puisque que c'est au cours de la dévotion que l'image céleste apparaît.
La Véronique, l'amie, la servante et la femme de dévotion (mon Seigneur et mon Dieu) perd l'origine de son prénom que Jésus rend à son portrait guérisseur par la foi, par la dévotion. La Véritable Icône reprend ensuite un sens incarné par la traduction latine Vera Icon, qui devient un prénom féminin alors que le portrait à l'origine de la légende est un masculin (Doctrine d'Addaï). Il y a donc au fil des siècles et des transmissions deux iconographies distinctes pour une même source que nous pouvons qualifier d'historique ou proche de celles de la manière des historiens modernes [qui ne donnent souvent pas plus de preuves et souvent moins à leurs constructions de rédactions que celles qui étayent l'histoire du portrait de Jésus, et parfois bien moins puisque les idéologies consensuelles de médias comblent souvent ces manques ou y suppléent, voir les dénaturent complètement] : celle donnée à voir par le portrait et celle donnée à lire par la légende. Ce sont là des thèmes récurrents présentés ou débattus sur différents modes par les auteurs.
c.3.4. La Véronique d'Ecouïs. Le XIV° siècle.
C'est l'iconographie issue de la légende : c'est le niveau final de l'évolution du thème depuis le portrait jusqu'à la Véronique et c'est la plus ancienne représentation de la Véronique d'après Emile Mâle. Iconographie qui va être à la source de toute une série de constructions que nous allons retrouver depuis la fin du Moyen âge, à la réforme du Carmel de Sainte-Thérèse d'Avila et de Gréco, à l'art baroque, à l'art classique et à la philosophie de Pascal et jusque dans l'art contemporain tel que j'ai pu l'étudier à visées de reprises par des psychologues (pansexualisme freudien qui est aussi une construction intellectuelle mais qui échappe à la divinité des images et des légendes sauf par les artistes du XX° siècle de haute volée comme Rouault, Joyce ou Klein) dans l'article que j'ai déjà présenté sur ce blog et que vous êtes déjà très nombreux à avoir lu. Il suffira donc de faire le lien avec cet article La Véronique - Image ou non de la représentation
http://coureur2.blogspot.fr/2012/12/la-veronique-de-la-legende-lart.html .
Le titre initial exact étant : Signe ou non de la représentation.
Remarquable est l'insertion dans un linge plissé d'une tête aux yeux fermés, dont à peu près aucune trace de pilosité n'est sculptée.
Ce serti de la tête, s'il n'y avait les yeux fermés, nous ramènerait de façon assez étonnante à l'iconographie retenue des têtes de la corniche de Saint-Amant-de-Montmoreau.
c.3.5. La Véronique des Mystères.
D'après Louis Réau "C'est seulement au XV° siècle, sous l'influence du théâtre des Mystères, que sa légende fut associée à la Passion du Christ [...]Pour expliquer qu'elle ait eu sous la main un voile, Les Mystères en fond une marchande de toile. Il ajoutent qu'elle était aveugle, comme Longin, et qu'elle recouvra la vue immédiatement en appliquant sur ses yeux l'image de la Sainte-Face [...]On tenait à savoir ce que la pieuse lingère était devenue après la mort du Christ. A l'instar de la légende provençale de sainte Madeleine, on créa, au profit d'une église située à l'embouchure de la Gironde, une légende gasconne de Sainte Véronique devenue l'apôtre du Médoc...elle se serait bâtie un ermitage dans les dunes de Soulac à la pointe de la presqu'ile du Médoc où ses reliques, conservées à l'église Notre-Dame-de-la-fin des Terres, sous la constante menace des sables mouvants, attiraient de nombreux pèlerins" [Louis Réau, 1959, op.cit., p. 1314-1315].
C O N C L U S I O N
Les sculptures sont très différentes entre Saint-Amant-de-Montmoreau et Ecouïs. L'une est début XIV° s. et l'autre est de la transition paléochrétienne/mérovingienne tant par les marqueurs donnés par André Grabar et par Jean Danielou, que par d'autres références données en cours d'études, en accord avec les images publiées des sarcophages à acrotères de cette période, et toutes deux représentent des faces drapées. Peut-on considérer que l'iconographie de Saint-Amant-de-Montmoreau représente deux fois la face sertie dans le voile, dans la nappe d'autel alors que la Véronique d'Ecouïs qui a gardé son voile sur la tête présente la face dans un linge conformément à la formation de La Légende Dorée d'où cette dernière iconographie est vraisemblablement issue avant qu'elle ne soit transposée au siècle suivant sur le chemin de Jésus montant au calvaire ; à Ecouïs il s'agit bien de la rencontre de l'image et de la légende par la présence du personnage féminin qui a pris le nom de l'image qu'elle montre Vera Icon par les sources latines.
A Saint-Amant-de-Montmoreau nous avons la face vivante recueillie dans le linge - suaire ou nappe qui sert à recouvrir l'autel - dans une représentation liée à la mort qui complète une représentation symbolique du jardin de Dieu, de la résurrection, par la sculpture d'un chapiteau corinthien décomposé et recomposé en branche de vigne articulée avec une des têtes ; la vigne du seigneur placée en chef de la sépulture là où les mérovingiens plaçaient la croix du baptême avant la mort.
La représentation de Saint-Amant-de-Montmoreau pourrait donc être à ce jour la pus ancienne formation achiropoète connue entre Le Portrait et La Véronique dans une ambiance stylistique de la fin de la période paléochrétienne ( sarcophage à acrotères à figures humaines composées à une étoffe de support et de présentation et à la vigne).
La pierre de la sculpture de Saint-Amant-de-Montmoreau est apparemment un calcaire mais je n'ai aucune précision sur sa provenance et je n'ai pas, non plus, d'exemple comparable dans la région. Pourrait-il s'agir d'une sculpture ou de fragments de sculptures récupérés sur le tombeau d'un saint et apportées ici comme une relique ? Vu la datation probable de ces fragments de sculptures réemployés à fins cultuelles et vu les sources orientales des histoires et des légendes contemporaines qui ont servi à l'étude de cette composition, on peut-être surpris de trouver ici une iconographie transitoire entre "le portrait" et "La Véronique" sur ce site de la Charente éloigné des grands foyers culturels et des nécropoles de l'époque de référence. En revanche l'appel aux répertoires végétaux et notamment à la vigne appartient aux caractéristiques ornementales des sarcophages paléochrétiens du sud-ouest de la France [cf. François Baratte, Catherine Metzger, musée du Louvre, op.cit., 1985, p. 320 et suivantes].
Ces répertoires végétaux de la vigne stylisée se retrouvent dans la sculpture mérovingienne du sud-ouest des Alpes, en Provence Orientale, en l'ancienne cathédrale de Vence
Eglises du sud-ouest des Alpes A travers l'art de la polychromie architecturale
http://coureur2.blogspot.fr/2013/02/eglises-du-Sud-Ouest-des-alpes-alpes.html
La dédicace à Saint-Amant est est elle un vecteur de recherches potentielles ?
Le site très particulier de Saint-Amant pourrait-il également être celui de la sépulture d'un saint qui aurait installé ici un premier ermitage ou une première vie monastique sachant que les premiers regroupements à l'origine des monastères et des règles de la vie monastique ce sont constitués autour d'ermitages ?
Nous avons aussi cette information donnée par Louis Réau de Sainte-Véronique apôtre du Médoc avec ses édifices du culte en Gironde soit à peu-près à seulement une centaine de kilomètres de Saint-Amant éloigné de pas plus de quarante-cinq kilomètres d'Angoulème premier foyer d'évangélisation de la région bien que Saint-Amant apparemment absent des archives diocésaines numérisées du Périgord relève du diocèse de Périgueux.
Avec Emile Mâle nous retissons des liens avec la diffusion du Christianisme :"Mais il y avait à Autun, comme dans toutes les grandes villes de la Gaule, une colonie d'orientaux , parlant le grec, que le commerce y avait attirés. C'est dans ce petit monde de Syriens et d'Asiates que les apôtres de la religion nouvelle, qui étaient eux-mêmes des Grecs, trouvèrent leurs premiers adeptes...[...]...Nous sentons ici quels liens étroits rattachaient le fidèle d'Autun au christianisme de l'Orient....[...]...C'est seulement au III° siècle que quelques grandes villes de la Gaule entendirent parler de la réligion nouvelle. Un texte célèbre de Grégoire de Tours nous apprend que sept missionnaires furent envoyés de Rome en Gaule par le pape Fabien, c'est-à-dire entre 236 et 250. ... Deux de ces missionnaires étaient certainement des Grecs, Trophime et Dionysos ou Denis." [Emile Mâle, La fin du paganisme en Gaule et les plus anciennes basiliques chrétiennes. Paris, 1961/62, p.18, 20 et 23]. Si les cultures asiatiques et grecques ont eu une telle importance par la présence des colonies orientales dans toutes les grandes villes de la Gaule aux premiers siècles de l'ère chrétienne il est alors clair que les deux formations iconographiques à partir des versions syriaques et grecques de La Doctrine d'Addaï - traduites par Alain Desreumaux et Andrew Palmer - sont en parité pour une recherche des sources de la formation transitoire de "La Véronique" (formation latine) de Saint-Amant-de-Montmoreau.
Pour des recherches des influences orientales sur l'art funéraire du sud-ouest de la Gaule c'est encore Emile Mâle qui nous renseigne, et nous retrouvons le vecteur Syrien "Nous n'avons encore rien dit jusqu'à présent des sarcophages décoratifs du sud-ouest de la Gaule qui sortaient des ateliers de Bordeaux, de Toulouse, de Narbonne. Ils témoignent d'un art tout à fait différent et dont les origines sont aujourd'hui nettement établies...En parlant des pèlerinages à Jérusalem, nous avons montré les Gaulois entraînés en Orient, dès le IV° siècle. Il faut maintenant montrer les Orientaux attirés par le monde gallo-romain et y fondant de véritables colonies.
A la fin de ce monde antique , les Syriens nous apparaissent comme les seuls navigateurs de la Méditerranée...S'il y a encore du luxe sous les rois mérovingiens , c'est à eux que la Gaule le doit...[...]...La vallée de la Garonne était une des routes commerciales les plus fréquentées de la Gaule...De Narbonne ces commerçants se rendaient sans peine à Bordeaux...Dans une église de Narbonne , un tableau représentait le Christ en Croix, les hanches entourées d'une ceinture. Une pareille image ne pouvait venir que de l'Orient où la crucifixion apparaît dès le VI° siècle. Le sujet était si nouveau en Gaule, qu'il choqua les fidèles et qu'on dut, nous assure Grégoire de Tours, le couvrir d'un voile. Les marchands syriens ont donc contribué pour leur part à la diffusion de l'art oriental". [ E.mâle, 1961, op.cit., p. 260 à 261 et suivantes]. Ici il serait intéressant de confronter les insertions des iconologues les plus sérieux comme Louis Réau déjà questionné qui donne l'origine du périzonium à Marie couvrant de son voile la nudité de Jésus sur la Croix. Puis l'auteur fait entrer au XV° s. le voile de Véronique dans le instruments de la Passion [ L.Réau, Iconographie de l'art chrétien - Tome second - Iconographie de la Bible - II - Nouveau Testament. Paris, 1957, p. 472 et 509]. (Ce qui fait que la représentation de Jésus en Croix couvert du périzonium n'a pas une origine au XI° siècle comme le prétendent de nombreux auteurs des chroniques faciles du net, mais bel et bien depuis les toutes premières représentations de la crucifixion par les textes ou par les images, quand bien même d'autres repréentations donnent une tunique complète à Jésus sur la Croix). Ce qui est une nouvelle fois confirmé par une note de Carol Heitz qui reprend la version narbonnaise : " Le scandale soulevé à Narbonne par l'apparition du premier crucifix est, à ce propos, significatif. L'évêque fut obligé, comme le rapporte Grégoire de Tours, de couvrir d'un voile l'image choquante" [Carol Heitz, 1963, op.cit., p. 146, note 3].
Nous pouvons encore remonter la bibliographie qui reprend les épisodes de la vie de Grégoire de Tours avec les Origines de l'art français de L.Brehier repris par Marie Madeleine Macary dans sa publication sur la Sculpture romane en bas-limousin, p. 129 en apportant la précision de l'origine de l'iconographie de la crucifixion au VI°.
Ces explorations historico-géographiques et iconographiques de la diffusion des représentations de la Passion du Christ peuvent-elles nous aider à essayer de préciser un peu plus le créneau historique probable de la réalisation sculptée de la corniche de Saint-Amant-de-Montmoreau si on retient un fragment de sarcophage et certaines évaluations d'auteurs qui donnent au VIII° l'apparition des sarcophages anthropomorphes ou trapézoïdaux alors que l'exemple du sarcophage de Saint-Radegonde (décédée en 587) témoigne déjà de la variété des profils et des formes des cuves, donc des couvercles ?
Cet inventaire des marqueurs donnés par les auteurs les plus sérieux, les mieux documentés, les plus érudits sur ces sujets de la naissance de l'iconographie chrétienne entre fin de la période romaine et celle chaotique s'installant en occident pendant la période mérovingienne, ne me semblerait pas complet ou à visées exhaustives principales sans cette citation de Louis Hautecoeur " Ces scènes sont les préfigures des miracles du Christ. Ceux-ci apparaissent timidement au II° siècle (cimetière Saint-Calixte) , plus nombreux au III° siècle, guérison de l'aveugle né, de l'hémorroïsse, du paralytique, multiplication des pains, noces de Cana. Dans une des branches de l'hypogée romain des Arellii le peintre suit l'Evangile de Saint-Matthieu. Peut-être cette iconographie est-elle venue toute constituée d'Orient; ne voyons-nous pas dans la chapelle de Doura Europos, datée de 232, les miracles de Jésus et sa résurrection ? Jésus est représenté imberbe; ce type qu'on déclarait jadis hellénique se rencontre en Orient, alors que le type barbu réputé oriental, existe déjà à Rome, au cimetière de Domitille. Il est probable qu'on ait donné au visage de Jésus tantôt le type apollonien, tantôt le jovien. Jésus est le souverain du monde et les empereurs romains se disaient représentants les uns d'Apollon, les autres de Jupiter. On a de même représenté Jésus drapé, comme Bouddha, dans la toge des orateurs, d'après des modèles comme le Sophocle du Latran ou l'Eschine de Naples.
L'image de la Vierge apparaît également au II° siècle..." [L.Hautecoeur, Histoire de l'art - 1 - De la magie à la religion". Paris, 1959, p. 256.]
Pour ceux qui voudraient suivre l'aventure de la Véronique jusqu'à ces deux formations ci-dessus et au-delà en impacts importants sur la construction de l'art contemporain par Georges Rouault, James Joyce, Yves Klein et les récentes publications poétiques de DOC(K)S, rendez-vous sur la page de ce blog La Véronique - Image ou non de la représentationhttp://coureur2.blogspot.fr/2012/12/la-veronique-de-la-legende-lart.html
L'étude en archéologie du bâti de l'église révèle un immeuble très complexe qui par ses dévers ne penche pas toujours du côté où il devrait tomber. La nef ne livre que de rares informations qui pourtant devraient être riche en cas de fouilles. En fait le site dans son ensemble, polymorphe comme certains autres sites de cette région du bassin de la Tude du sud Charente, parlera t-il un jour ou l'autre ou commence t-il déjà à parler par cette étude comme par d'autres de ce blog ?Avant d'aborder l'histoire du monument, de l'église de Saint-Amant-deMontmoreau, faut-il encore questionner cet autre réemploi en corniche du pilier nord-ouest - en vis à vis de la corniche aux têtes drapées - pour avancer encore vers un espace historique élargi ou mieux cerné de l'occupation du site ?Ici nous n'avons qu'un angle qui s'adapte mal à la pile et qui ne s'articule à son prolongement que par l'artifice d'un ajustement difficileL'identification des repertoires assez grossièrement taillés est assez délicate sauf si on accepte - comme pour les retombées des étoffes de la corniche voisine aux masques - une simplification des formes entre période paléochrétienne, voire antique, et retour des répertoires antiques dans l'art roman, dont les commentaires de Marie-Thérèse Camus pour les deux corniches ci-dessous pourraient une nouvelle fois orienter les recherches vers les avatars des répertoires antiques du bas-moyen-âge avant ceux reconstruits à partir des périodes carolingiennes et surtout du XI° siècle.Dans la cohorte des observations qui peuvent découler de l'analyse des deux corniches de Saint-Amant-de-Montmoreau il faut remarquer que l'entrelac, en principe caractéristique de l'art mérovingien, y est absent au profit d'un appel aux répertoires antiques et avatars qui ont revivifié l'art roman en s'associant, , par ailleurs, aux entrelacs pour créer des synthèses de superbes chapiteaux romans de Bors-de-Montmoreau à Montmoreau sans passer par Saint-Amant où on repère, en revanche, des emplois de corniches en bandeaux d'impostes conformes aux entrelacs d'une autre église de la région, un peu excentrée du bassin de la Tude, mais très peu; en l'église de Poullignac dont la nef charpentée est donnée au XI° pour un chevet plat à deux lancettes, construit dans la seconde moitié du XII° siècle . Tout comme à Saint-Amant, les corniches en impostes sont localisés sur les piles de l'avant choeur strictement."...Si bien qu'au dédale linéaire où notre vue se perd s'ajoute l'illusion optique d'un faux relief...Mais l'élément le plus remarquable du décor irlandais , c'est évidemment l'entrelacs. Ce thème se retrouve dans beaucoup de civilisations anciennes...[...]...Il y a là toutes les courbes de la vie, si bien que l'on croirait , en certains cas, avoir sous les yeux une coupe micrographique, et en même temps une secrète volonté d'architecture....Par le pilier de Cravant, nous avons un exemple de l'usage que l'art carolingien fit de la tresse... [...]....Mais ce rectangle sculpté n'est pas destiné à l'architecture; non seulement ce n'est pas de la sculpture monumentale, mais ce n'est pas de la sculpture commandée par l'architecture, et c'est sur ce point que se fonde la distinction essentielle entre le carolingien et le roman, entre un décor d'applique et un décor proprement monumental... La sculpture romane travaille dans la pierre. Elle s'accorde avec les fonctions de l'architecture" [Cf. Henri Focillon, L'art des sculpteurs romans. Vendôme 1982, p. 97 à 109.]. Ce qui nous fait comprendre que les impostes de Poullignac ont toutes les chances de rejoindre les formations romanes du XI° siècle (L'étude de la structure sur la page Eglise Saint-Martin à Poullignac - Architecture et décors peints - Une source de recherches pour les églises des diocèses du Sud-Charente et principalement du bassin de la Tude entre Diocèses de Saintes, d'Angoulême et de Périgueux, de leurs origines aux évolutions et modifications du XIX° siècle https://coureur2.blogspot.com/2023/06/eglise-de-saint-martin-de-poullignac.html, tendrait à démontrer une sculpture plus proche, ou autour, de l'an 1000 que de l'an 1100) alors que le réemploi des corniches de Saint-Amant-de-Montmoreau se situe dans un esprit roman regardant des reliques du Haut-Moyen-Âge pour en faire des sculptures adaptées aux sites architecturaux, alors que cette nouvelle formation, ci dessous, découverte en matériel lithique déposé dans dans l'église de Médillac - construite sur une croupe de fin mouvement de terrain qui domine en sentinelle le confluent de la Tude et de la Dronne - nous ramène vers l'art carolingien avec un étonnant jeu illusionniste sur les éclats sertis en rosaces dont les modèles sont fréquents en croix d'ornements des couvercles de sarcophage ( Voir les multiples variations données par Edouard Salin La civilisation mérovingienne d'après les sépultures, les textes et le laboratoire - Deuxième partie Les Sépultures. Paris, 1952 - En mur extérieur nord de l'église de Médillac un couvercle de sarcophage anthropomorphe est déposé mais s'il y eut des ornements ils sont désormais illisibles). En effet cette pierre n'a aucune caractéristique logique de l'art roman et pas d'avantage d'art romain mais le lecteur attentif et observateur pourra retrouver l'essentiel des caractéristiques des entrelacs carolingiens, voire mérovingiens jusqu'à l'art pré-roman et roman.A Médillac on peut avoir une première impression de vestige d'une baie géminée monolithe et peu épaisseDans la formation des répertoires quasi obligés des corniches, et des pointes de diamants des archivoltes, on peut se laisser aller à des lectures en dents de loups et feuilles lesbiques de l'antiquité tardive. Mais c'est aller un peu vite en besogne puisque ces rangées de dents de loups, parfois rehaussées de peintures à deux coloris alternés, sont aussi des alignements d'éclats de la rosace des entrelacs alors que ce qu'on peut lire en "feuilles lesbiques" ou "avatars de palmettes" peut avoir une autre source : celle de la baie répétée et répétitive qui a rejoint les rangées d'éclats désormais domptés et organisés en lien étroit avec l'architecture et le décor servant l'architecture.Pour l'élargissement de nos regards sur cette vie des formes qui pose effectivement question et pour la compléter par une valeur symbolique chère aux médiévistes dans ce voyage subtile des formations iconographiques des répertoires ornementaux qui deviennent des thèmes quasi obligés et surtout usuels je peux évoquer la transcription des arcades de péristyles dont les répétitions d'arcades deviennent des frises parfois obligées des mosaïque de l'antiquité tardive ou paléochrétienne comme on le voit par cette mosaïque de Conimbriga au Portugal dont je vous donne ici le texte du site accompagnant la présentation de la mosaïque que j'ai photographiée in situConimbriga - Portugal: exemplo de uma decoração de mosaico ao solo que associa entrelacs às decorações geométricas e cercadura arcatures de pórtico péristyle. Arcatures à ordens (travessões e bases das colunas sobre solo rectiligne ou prato) nas quais as figuras de celebração do tribunal imperial serão representadas ao período carolingienne ao lugar das aberturas styllisées em figuras retangulares inscritos em cada arcada sobre este mosaico da casa do mosaico aos svastikas.Cette iconographie du portique péristyle est celle qui passera dans les représentations pour valoriser l'image impériale et de toutes sortes de présentations depuis l'antiquité tardive jusqu'à la période gothique
Le système ornemental de la pierre de Médillac a eu aussi une évolution propre, par la simple vie des formes et leurs organisations en accompagnements et valorisations des structures architecturales. Depuis l'antiquité tardive à l'ère mérovingienne/carolingienne à la période romane, l'évolution et la permanence du simple thème extrêmement fort de l'éclat - cette simple forme triangulaire sculptée - s'organise en plusieurs répertoires autonomes, ou faisant appel à des apports extérieurs.Les évolutions en appels extérieurs ont été vus avec la combinaison du thème schématiséLe triangle de l'éclat peut devenir à son tour une forme géométrique majeure de la figure ornementale liée à l'architecture, enrichie d'une frise de dents de loups.Nous allons maintenant quitter cette digression périgourdine si intéressante et revenir vers les églises du bassin de la Tudenon sans vous avoir donné une image de ces deux églises charentaises qui nous ont permis d'élargir le sujet, de le creuser, de l'enrichir, et bien sûr de vous en recommander chaleureusement la visite dans cette magnifique campagne ondoyante du Sud-CharenteLes récentes fouilles dans la vallée de la Tude par l'INRA ont mis à jour une importante activité autour et probablement à partir des gisements de fer de la vallée de l'Argentonne - affluent de la Tude - à la hauteur d'Yviers à 4 km de Chalais.Entre XI° s. et Renaissance tant l'église que le bourg d'Yviers et ses environs sont riches en vestiges polymorphes visibles.en remontant et en oscillant sur le bassin de la Tude on trouve beaucoup d'églises fort intéressantes à partir de la période romane, principalement, et modifiées au cours des siècles comme à Yviers , enrichissant le patrimoine culturel de cette région Sud-Charente, en fait très mal connu. Un très gros travail reste à faire, comme dans beaucoup de régions de France. André Malraux, ce ministre d'exception et exceptionnel, sans parler de son oeuvre d'écrivain, l'avait parfaitement compris en créant le service de l'Inventaire.Pour avancer dans la recherche sur le bassin de la Tude j'avais été amené à cartographier les mottes de la vallée ainsi que les églises romanesUne seule de ces mottes est à la fois le site d'un château et de l'église (classée).L'association ou le lien entre l'église et les indiscutables vestiges d'un important château à Curac (deux aulas, dont une dans un remarquable état de conservation avec cheminée et décor peints) est un des résultats de mes recherchesqui ne se sont pas figées sur les deux sites toujours courtisés de la vallée, Chalais et Montmoreau. De cette façon nous découvrons et nous mettons à jours une nouvelle identité historico-culturelle de ce bassin de la Tude, du sud Charente, à laquelle les fouilles de L'INRA en ce printemps 2021 ont apporté encore une richesse jusqu'à ce jour insoupçonnée depuis la civilisation Gauloise bien que la richesse du site d'Yviers avait été pressenties, sans doute pas jusqu'à la Gaule, et que je confirmais ne serait-ce que par mes propres investissements depuis 2018.L'héritage du Haut-Moyen-Âge dans cette région des marches Saintonge - Angoumois - Périgord reste très sensible, voire pseudo-imitatif jusqu'aux accumulations ou aux appauvrissements des emprunts, et, pour conclure ce joli voyage dans les temps anciens sur une très belle région au si riche patrimoine, ces deux exemples à ses extrêmesaccumulationssur sites réduits - chapiteaux : corniches, tailloirs et astragales (les médiévistes utilisent les deux appellations sur un même programme) étant épargnés ou très sobrement ornés de tores et baguettes sur des profils plats et cavetsappauvrissements :impostes de transition directe nef-choeurPoursuivant sur la trajectoire engagée et en oscillant sur les nombreuses routes qui partent ou rejoignent la vallée la Tude, le site de Saint-Amant-de-Montmoreau s'est imposé à moi en tournant autour du superbe vallon du Toulzot (site classé).Et nous allons voir par le prochain article que ce choix va à son tour attirer vers lui nombre de petites églises de la vallée et de ses alentours en étais scientifiques qui n'apparaissent dans aucune bibliographie, à commencer par ces vestiges de sculptures du Haut-Moyen-Âge parfaitement inédits avant mes recherches et présentations sur cette page de mon blog, tout comme l'était l'analyse de la motte de la Forêt.Pour une première approche archéologique du bâti hors sol de l'église et du site de Saint-Amant-de-Montmoreau, rendez-vous sur le prochain article de ce blog :Saint-Amant-de-Montmoreau, Sud-Charente - Des vestiges du Haut-Moyen Âge à la naissance du gothique sur les marches Périgord/Angoumois/Saintonge- une maison tour - Première Renaissance Française.https://coureur2.blogspot.com/2021/07/saint-amant-de-montmoreau-sud-charente.html
_______________________________________________________________________________________________Pour un retour en lienavec quelques articles sur les 148 de ce blog, qui présentent des œuvres, des approches d’œuvres et des artistesFor a return to linkswith some 148 articles on this blog, which exhibit works of art and the artists approachesPour aller directement sur les articles ou pages, vous pouvez utiliser deux chemins, le clic direct ne fonctionnant pas :1: Surlignez la ligne http ou le titre de l'article qui vous intéresse, puis faites un copier/coller sur la barre d'adresses en haut de page;2 : surlignez la ligne http, puis clique droit, et sur la boite de dialogue qui s'ouvre allez à la ligne " accédez à la http..."c'est simple et vous pouvez le faire avec autant d'articles que vous le souhaitez.Pour les autres articles encore non inscrits sur la liste ci-dessous vous pouvez allez à droite de la page sur "moteur de recherches" ou "archives du blog" en cliquant sur l'année et le mois qui vous intéressent.
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